Guy Bedos

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Guy Bedos

Guy Bedos est un humoriste né le 15 juin 1934 à Algera (Algérie française) et mort le 28 mai 2020. D’une ancienne famille de Pieds-noirs, Guy Bedos, fils d’un visiteur médical, est élevé par un beau-père, et surtout par sa mère, pétainiste, antisémite et d’extrême-droite. Arrivé à Paris en 1949 avec sa famille, Guy Bedos se lance dans le théâtre pour faire une carrière d’humoriste à partir des années 1960, puis d’acteur dans les années 1970. D’abord en duo avec Sophie Daumier, sa femme (pour les quelques rares meilleurs sketches de sa carrière), il se lancera dans le « stand-up politique » avant la lettre, commentant les actualités en cours, exercice typiquement dans la lignée des chansonniers des années 1950 de la rive droite dont il prétendait se distinguer.

Au théâtre, il interprétera le rôle-titre dans La Résistible ascension d’Arturo Ui (une figure inspirée d’Hitler) de Bertolt Brecht, dans une mise en scène de Jérôme Savary en 1994. Au cinéma, il a joué notamment dans le diptyque sur-évalué Un éléphant, ça trompe énormément (1976) / Nous irons tous au paradis (1977) d’Yves Robert/Jean-Loup Dabadie (auteur de ses sketches), où on peut constater ses limites de comédien. Celles en tant que scénariste (limites transmises à son fils, Nicolas) sont clairement visibles dans le film Dragées au poivre (1963), dont l’échec ne l'incitera pas à passer complètement de l’autre côté de la caméra.

En 1984, il poussera son ami Pierre Desproges (aussi surestimé que lui) à monter sur scène, ce pourquoi le journaliste n’était pas fait.

Politiquement, en 1985, Guy Bedos participe au lancement de S.O.S. Racisme. En mai 1989, il défile à Paris dans la manifestation organisée suite à la profanation du cimetière juif de Carpentras. Guy Bedos était membre de la Ligue des droits de l’homme, de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité, et soutenait l’association Droit au logement. En 2002, il s’oppose à l’extradition de la France vers l’Italie de Cesare Battisti, avant de soutenir publiquement Yvan Colonna en 2008. Il soutient Jean-Luc Mélenchon en 2012, avant de se moquer sur scène de Nadine Morano en 2013 puis d’attaquer Manuel Valls en 2017. En 2017, il soutient Gérard Filoche qui avait été exclu du PS (après avoir retweeté un photo montage antisémite publié par Égalité et Réconciliation d’Alain Soral). Un parcours sans faute donc dans la bien-pensance, balisé par cinquante ans de mi-one-man-shows mi-meetings, de Bobino (1965) à l’Olympia (2013).

Dans les années 1990, Guy Bedos et Thierry Ardisson multiplient les signes d’hostilités l’un envers l’autre dans les médias. En février 1993, dans son éphémère émission Ardimat, Ardisson diffuse un sujet sur les comiques morts et place Bedos entre Coluche et Fernand Reynaud[1]. Vexé au lieu d’être flatté d’être en compagnie de véritables artistes de l’humour (ce qu’il ne sera jamais), Bedos critiquera régulièrement Ardisson, sa personnalité et ses émissions[2].

En mars 1995, Guy Bedos est condamné pour avoir licencié un couple de domestiques portugais, condamnation moquée par Jean-Edern Hallier dans son émission Le Jean-Edern’s Club où l’écrivain se présente avec une perruque rappelant que Guy Bedos en porte une (d’abord grisonnante puis totalement blanche) depuis plus de vingt ans : « J’ai une solidarité de perruque, de moumoute, avec Guy Bedos. Ce Guy Bedos, homme de grande conscience de gauche qui vient d’être condamné pour avoir viré ses domestiques portugais. Guy Bedos, donneur de morale de la gauche caviar qui pue[3] ».

Toute réconciliation avec Hallier ayant été impossible, et pas seulement par la mort de ce dernier survenue en 1997, il n’en sera pas de même avec Thierry Ardisson. En septembre 1999, Philippe Gildas organisera sur France 2 un première rapprochement entre Bedos et Ardisson, mais l’humoriste, sans aucun humour sur lui-même, quitte le plateau.[4]. Ce n’est qu’en 2002 qu’une véritable réconciliation entre les deux hommes aura lieu lors de la manifestation au Trocadéro contre la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle de 2002. Ardisson l’invitera dans Tout le monde en parle après l’élection de Jacques Chirac[5], puis montera une émission spéciale en octobre 2002 : Bedos-Ardisson, on aura tout vu.

En 2008, dans le conflit qui oppose Siné à Philippe Val, ayant licencié ce dernier, Guy Bedos prend le parti du dessinateur mythique accusé d’antisémitisme, et se montre publiquement très venimeux contre Charlie Hebdo, souhaitant même la mort du journal. Mais, au moment des attentats du 7 janvier 2015, Guy Bedos reviendra piteusement sur ses propos jusqu’à les renier.[6]

Les dernières années de l’humoriste qui a fait ses adieux à la scène en 2013 à l’Olympia seront ternies par la maladie malgré l’essor de la carrière de son fils, Nicolas, montant peu à peu les échelons médiatiques du succès en tant qu’auteur de théâtre, chroniqueur télé et enfin « cinéaste »... Ses obsèques, sans surprises, ont été célébrées à l’église Saint-Germain des Prés avec tous ses amis people-bobo-gauchistes qui l’accompagneront également en avion privé jusqu’en Balagne, à Lumio exactement, où Bedos souhaitait être enterré dans cette Corse qu’il osait appeler : « mon Algérie de rechange ».

Liens avec Marc-Édouard Nabe

Aucun lien sauf que depuis toujours, l’écrivain n’a jamais pu supporter « l’humoriste ». Plusieurs fois, son père, Marcel Zannini, et même sa mère Suzanne, qui allaient régulièrement voir Bedos en spectacle, avaient proposé au jeune Alain de les accompagner : refus du jeune homme pour qui Bedos était avant tout pas drôle et tout à fait méprisable dans ses prises de positions prévisibles et systématiquement gauchistes, bourgeoises et mêmes louches quant à la question d’un racisme anti-Arabes ainsi qu’une misogynie de beauf, les deux exprimés à un second degré qui soi-disant était exempt de toute ambiguïté. Par exemple, pour un anti-colonialiste viscéral qui a l’oreille, comme Nabe, le sketch « Vacances à Marrakech » mettant en scène un touriste français se plaignant d’un trop grand nombre d’Arabes au Maghreb ne pouvait pas être « joué » par hasard par un Pied-noir qui avait vécu pendant les quinze premières années de sa vie en Algérie française.

Après l’Apostrophes du 15 février 1985 où Marc-Édouard Nabe était venu défendre son premier livre, Au régal des vermines, il ne fait aucun doute que Guy Bedos ait fait partie, avec ses amis Simone Signoret et Yves Montand, des spectateurs hostiles à la prestation du jeune écrivain.

En mars 1995, Nabe, pourtant invité récurrent de l’émission Le Jean-Edern’s Club (Paris Première) n’était pas présent dans celle où Hallier se moqua de l’humoriste Bedos en s’affublant d’une perruque, mais ça n’empêcha pas l’ex-pamphlétaire de L’Idiot international de féliciter l’ancien directeur du journal pour cette bonne action.

Jean-Edern Hallier sur Bedos, Ligne de mire, France 3, novembre 1996

Les accrochages à venir avec son fils, Nicolas, n’arrangeront pas la vision que Nabe avait depuis le début du travail médiocre et pernicieux de l’humoriste engagé. À différentes reprises, dans ses livres, l’auteur de Rideau ou de Fini de rire ne manquera pas de piquer l’orgueil du comique.

Mais ce que Nabe surtout ne pardonnera pas à Bedos, c’est son revirement au moment des attentats de Charlie. En effet, comme on sait, l’« humoriste de gauche », après avoir très justement craché sur le Charlie époque Val en 2012 (et avoir participé au financement, avec Michel Onfray, de Siné Hebdo en 2008[7]), rejoindra les pleurnicheurs de 2015 du Charlie de Charb, par peur de valider une action terroriste d’Arabes. Nabe consacrera à cet énième dégonflade un long paragraphe sur les Bedos père et fils dans Patience 2 (2015)[8].

À noter : c’est au moment où, dans une de ses émissions, Rive droite/rive gauche, en 2001, Nabe comparera l‘allure de Guy Bedos à celle de George W. Bush que Thierry Ardisson s’exclamera au sujet de l’écrivain un célèbre : « Je l’adore ! » (voir Citations).

Citations

Nabe sur Guy Bedos

  • « L’humour, c’est la confusion. Voyez les Coluche, Bedos, etc. Au lieu de faire rire des beaufs, ils les font rire... À force, leur cible est devenue leur public. C’est triste. Ils ont beau s’expliciter, se surpolitiser, le mal est fait. Elles ont bon dos, ensuite, les “convictions” du chansonnier ! Guy Bedos me fait rire. Il efface une heure de sarcasmes par Le Temps des cerises à l’harmonica bien poignant pour la Pologne ! Ça y est : il n’est plus crédible. Son persiflage perd tout son poivre : il n’est plus que le ridicule militant qui fait encore — déçu ou pas — une différence entre la droite et la gauche alors qu’il n’en ferait pas entre la droite et l’extrême-droite. Ah ! ce fameux moment tendre, l’interruption de la déconnade pour passer aux choses sérieuses !... Tout ça à cause de l’humour, ce Veau d’or pour veaux ! » (Rideau, 1992, pp. 24-25)
  • « À part quelques comiques professionnels appelés à la rescousse pour soutenir les animateurs “drolatiques” (Guy Bedos est devenu en quelques années un employé de la télé), personne n’a le droit d’entrer dans cette forteresse. » (Rideau, 1992, p. 163)
  • « Chirac fut réélu à 82 % [...] Ardisson n’avait plus qu’à sabler le champagne ! C’est exactement ce qu’il fit avec son vieil ennemi Guy Bedos, venu se réconcilier dans un Tout le monde en parle d’une complaisance effarante... On apprendrait à cette occasion que ces deux-là s’étaient retrouvés au Trocadéro en train de chanter la Marseillaise et que c’était là que la réconciliation avait eu lieu...
Bedos arriva comme soulagé sur le plateau de Thierry. Il raconta qu’il avait trouvé l’émission précédente sur Le Pen avec Bernard-Henri Lévy tellement bonne qu’il s’était dit que “si la démocratie terrassait le fascisme” (traduction : si Chirac était, grâce aux gauchistes culpabilisés, à nouveau élu président, et pour cinq ans), il viendrait fêter la victoire en trinquant avec Ardisson qu’il détestait depuis que Thierry l’avait ringardisé en en faisant un “comique mort”. C’était surtout que Bedos avait compris que Tout le monde devenait de semaine en semaine l’émission la meilleure et la plus vue, celle où il fallait passer...
On vit donc physiquement Guy Bedos et Thierry Ardisson faire tchin-tchin avec leurs flûtes de champ’ ! Les yeux dans les yeux, avec feux d’artifice (les bien nommés), bourrades d’amitiés éternelles... Heureux, le monarcho et le gaucho désormais liés à la vie à la mort, et au-delà... Ils croyaient trinquer à la défaite de Le Pen mais non, c’était bien à la victoire de Chirac ! » (Les Porcs tome 1, 2017, p. 66)
  •  « Le samedi 23 septembre, dans la nouvelle émission de Laurent Ruquier On n’est pas couché (couché, Ardisson !), Moix fut invité en présence de Guy Bedos et Bernard Kouchner, pour Panthéon, donc, son nouveau navet. À un moment, la question vint sur l’extrême-droitisme des parents de Guy Bedos. Ruquier alors, à la stupéfaction générale, et à la mienne, sortit un exemplaire de Bagatelles pour un massacre ! Un vrai ! C’est ce que la mère Bedos lisait et adorait. Ruquier brandissait le livre authentique, d’époque (1937) mais neuf, comme s’il venait de sortir, presque comme s’il le recommandait. Magnifique effet à la gueule de Bedos qui se contenta de dire que dans les livres de Céline, il fallait “choisir”. » (Les Porcs tome 1, 2017, pp. 346-347)

Intégration littéraire

Notes et références

  1. Ardimat, France 2, 13 février 1993.
  2. « Je déteste Ardisson. [...] Ardisson, un jour, je l’ai rencontré, il m’a dit : “Pourquoi tu passes pas dans mes émissions ?” D’abord, pourquoi il me tutoie, lui ? Je le connais pas... Je passe pas dans tes émissions parce que j’aime pas tes émissions, parce que je t’aime pas, toi. Il me dit “Est-ce que t’as lu mes livres ?” Je lui dis : “J’ai pas fini Balzac, c’est plus urgent...” Depuis, évidemment, c’est la haine, Ardisson. Mais il y a des gens dont on aime bien être détesté. », Thé ou Café, France 2, 29 septembre 1996.
  3. Le Jean-Edern’s Club, Paris Première, mars 1995.
  4. Antenne interdite : transgression à la télévision, France 2, 18 septembre 1999.
  5. Tout le monde en parle, France 2, 11 mai 2002.
  6. Guy Bedos sur Charlie Hebdo (2012 - 2015)
  7. « Onfray aussi, je l’avais bien repéré, à l’époque. “Onfray enfoiré !” J’avais du mal à supporter que Siné soit tombé dans son panneau “athée”, et même qu’il ait accepté du fric, si peu, 2 500 euros partagés entre lui et Bedos, pour lancer son canard boîteux » (in Les Porcs tome 1, 2017, p. 658), thèse validée par Jacques Vergès : « Jacques “Mansour” me dit aussi qu’il avait lu mon texte sur Siné et qu’il me félicitait…
    — Je pense qu’il y a du Guy Bedos là-dessous ! » (in Les Porcs tome 1, 2017, p. 687)
  8. « Il était­ évident ­que ­Bedos ­se ­dégonflerait.­ Ça ­ne traîna ­pas.­ Avec Pelloux la pleureuse, “Docteur Kleenex” pour les intimes, il se déballonna à la télé un matin. Thé ou café ? Eau de boudin, s’il vous plaît ! Bedos se défaussait carrément de sa réaction en 2012 contre l’acharnement de Charlie à faire des caricatures du Prophète ! Il osa même mélanger ça avec l’affaire Siné qui datait de 2008 ! Il n’avoua même pas que c’était bien à cause des caricatures qu’il en voulait à Charlie, tellement il était inconvenant, en cette semaine de deuil, de trouver la moindre chose à redire sur le torchon islamophobe. Guy Bedos trichait en disant que s’il avait râlé, c’était parce qu’il avait eu peur des réactions des Arabes à l’encontre de ses amis dessinateurs, et pas parce qu’il les désapprouvait, eux, de ratonner symboliquement les musulmans chaque semaine à coup de dessins ! Oh, que c’était laid comme rétropédalage dans la semoule de couscous !
    “Crève, Charlie !” Ce moment de mauvaise humeur auquel s’était laissé aller Guy, c’était “à la Charlie, bien sûr”, ajouta Pelloux pour couvrir le vieux emperruqué (encore un personnage de Molière qui s’ignore)... “Ce sont des histoires de famille, des chamaillages qui n’entamaient jamais le fond...”, pleurnichait le docteur humide. Ben voyons ! Quelle bande de révisionnistes ! Je ne pouvais plus supporter tous ceux qui participaient à cette confusion volontaire de toutes les époques de Charlie Hebdo, malaxées dans un magma bouillonnant de merdouille consensuelle à dégueuler. » (Patience 2, 2015, pp. 131)