Harry Houdini

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Harry Houdini, 1908

Ehrich Weisz, dit Harry Houdini, est un illusionniste et escapologiste né le 24 mars 1874 à Budapest, ayant fait toute sa carrière et devenant célèbre en Amérique. Il est mort le 31 octobre 1926 à Détroit d’un accident lors d’un de ses tours de magie.

Liens avec Marc-Édouard Nabe

Affiche publicitaire pour les spectacles d’Houdini

Marc-Édouard Nabe a découvert Harry Houdini très exactement le 27 août 1969, alors qu’il était encore à Marseille pour quinze jours avant de « monter » à Paris avec ses parents. Ce soir-là, à la télévision, dans le cadre de l’émission Les dossiers de l’écran était diffusé le film Houdini le grand magicien (1953). Le personnage marqua fortement le jeune Alain Zannini. Dans le débat qui suivra la diffusion du film, on peut noter que se trouvait Kassagi, « manipulateur » et magicien déjà connu à l’époque pour son rôle dans Pickpocket de Robert Bresson (1959) et que Nabe retrouvera aux côtés de son père dans les années suivantes au cours de galas et d’émissions de télévision. D’ailleurs, le fils de Zanini copinera avec le fils de Kassagi qui avait le même âge que lui.

Le personnage, mais aussi la philosophie de vie et la technique d’évasion d’Houdini se retrouveront régulièrement cités par métaphores (ou pas) dans l’œuvre de Marc-Édouard Nabe. Le sommet de cette « houdinisation » de tout personnage arrivant à se désentraver de ses liens imposés sera en la Personne du Christ s’échappant de son tombeau et auquel Nabe comparera le magicien américain :

« Dimanche 22 avril [1984]. — Pâques. On sort du Sépulcre ! Va-t-on vers l’Utérus ?... L’affaire est close. À l’année prochaine !... L’oiseau s’est envolé. Trois jours lui ont suffi pour se recomposer. C’est l’octave de gloire ! La naissance pascale ! Jésus, c’est Houdini : il sort de la boîte sans la briser. C’est la résurrection sans effraction. Gentleman prestidigitateur ! Magie des déchaînés sans effort.[1] »

Houdini n’a pas servi seulement d’exemple à Nabe dans ses livres, mais aussi pour bien des attitudes de l’écrivain dans sa vie même (« Je suis l’Houdini des contacts humains... [2] »), comme le rapporte Stéphane Zagdanski dans son livre Pauvre de Gaulle ! dans un passage au sujet de Marc-Édouard Nabe :

« Il excelle dans les situations explosives. Dès que ça tourne à l’aigre, il est dans son élément. Son sens prodigieux de l’improvisation lui permet de s’extirper des pires circonstances avec une virtuosité de matador. Ce garçon torée carrément la poisse. À croire qu’il attire les mauvaises passes pour mieux s’en sortir. J’ai assisté à des scènes extravagantes qui paraissaient s’aimanter autour de sa personne comme pour venir assister de plus près au spectacle houdinesque de son évasion d’un coffre-fort de tracas immergé sous des mètres cubes d’ennuis. Comme si l’éclat sarcastique de Marco finissait par faire s’esclaffer le Fatum, comme si les flammes d’hilarité émanées de son cerveau parvenaient à chatouiller les événements eux-mêmes.[3] »

Citations

Nabe sur Houdini

  • « Le tombeau vide. Les aficionados le constatent : le linceul, les bandelettes, la mentonnière, tout est là, à la même place mais sans le corps qu’ils enroulaient. Prestidigitation terrible, on a vu ça cent fois au music-hall. Mais là, c’est vrai. Les linges funéraires sont dégonflés comme une bouée. Houdini s’est envolé. Il ne reste plus que Sa chrysalide sépulcrale. Sur la banquette de pierre, seul le corps manque. Il bouillait tellement qu’Il s’est évaporé dans l’atmosphère. » (L’Âge du Christ, 1992, p. 124)
  • « Jeudi 28 juillet 1988 . — Le petit David adore m’attacher avec des cordes. Il voudrait savoir comme je fais pour réussir à me délivrer. Je lui raconte le film sur Houdini avec Tony Curtis qui m’avait tellement impressionné à son âge (neuf ans)... Ligoté, saucissonné des pieds et des mains, j’arrive, en tendant mes muscles au moment où il m’attache pour ensuite les détendre (voilà le secret !), à me détacher... N’est-ce pas tout à fait ma situation en ce moment ? Prisonnier des ennuis, serai-je assez habile — en bon Prométhée houdiniesque — pour me désenchaîner rapidement ? » (Kamikaze, 2000, p. 2815)
  • « Harry Houdini était l’une de mes idoles, depuis que j’avais découvert à dix ans le film retraçant sa vie avec Tony Curtis. Je n’ai jamais revu ce mélo technicolor, comme d’ailleurs je n’ai jamais voulu revoir les deux ou trois autres films qui ont marqué ma destinée. Je suis tatoué par le cinéma. Le réalisateur de Harry Houdini, le grand magicien (1953) avait repéré Tony Curtis dans un microrôle de Quo Vadis, le péplum où il exécutait bibliquement un petit tour de magie avec un œuf. Ainsi, l’acteur fut choisi pour incarner le roi de l’évasion. J’étais fasciné par la décontraction avec laquelle Houdini se libérait de toutes les entraves qu’il exigeait qu’on lui impose. C’était déjà tout à fait moi ! Qu’il fût enchaîné, ligoté, sursaucissonné dans une camisole de force, ou bien cadenassé (avec menottes aux pieds et pedottes aux mains) dans une malle des Indes immergée sous les grands glaçons de l’Hudson River, ou alors autotorturé par des contorsions impossibles à l’intérieur d’une pagode chinoise, Houdini le héros se dégageait toujours. Après avoir défié le monde entier, il faisait éclater toutes les serrures, défaisait tous les nœuds, rompait toutes les cordes inextricables... Quel escapologiste ! Un maître du largage des amarres ! Ceux et celles qui avaient cru pouvoir me contraindre, m’enfermer dans un rôle (le mien !), me faire entrer, corps et âme (l’âme prend plus de place que le corps), dans une petite boîte pas plus grande qu’un coffre, ou encore me coincer dans une pagode de torture professionnelle, familiale, sentimentale, étaient dans l’illusion. Les serruriers du social ont sous-estimé mes petits secrets. Les geôlières de l’âme n’ont pas bien fouillé tous mes recoins. Je n’étais pas dupe de leurs caresses pour trouver mes rossignols... C’est toujours à l’endroit où on ne les cherche pas que les trésors sont cachés. Les fouilleurs furent bredouilles et les farfouilleuses furax. Et moi, j’étais déjà loin. » (Alain Zannini, 2002, pp. 17-18)
  • « Le but de tout vrai artiste au début de ce siècle est d’échapper à la culture, de s’en évader, quand bien même il serait parfaitement ficelé par son propre talent, comme Houdini se désincarcérait de ses boîtes magiques ! Et pour sortir de la culture, il faut beaucoup d’art. Lui seul donne du fil à tordre et à retordre aux parasites cultivés qui ne rêvent que de tuer l’artiste, même après sa mort » (« Le 11-Septembre de Mallarmé », J’enfonce le clou, 2004, p. 45)

Intégration littéraire

Notes et références

  1. Marc-Édouard Nabe, Nabe’s Dream, Éditions du Rocher, 1991, p. 378.
  2. Marc-Édouard Nabe, Nabe’s Dream, Éditions du Rocher, 1991, p. 463
  3. Stéphane Zagdanski, Pauvre de Gaulle !, Fayard/Pauvert, 2000.