Rideau

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Couverture de Rideau, 1992

Rideau est un essai de Marc-Édouard Nabe publié par les éditions du Rocher en mars 1992.

Résumé

Le livre est un pamphlet contre l'univers médiatique en général, et la télévision en particulier. Il s’agit de la version augmentée d'un long article publié par Nabe, dans L’Idiot international, en février 1990[1]. Nabe y brosse un tableau virulent de l’état de la société du spectacle, après le constat de Guy Debord mais en incluant celui-ci dans sa critique radicale. Il détaille les travers grotesques des figures télévisuelles les plus célèbres (Michel Drucker, Patrick Sabatier, Patrick Sébastien...), des humoristes qui ne sont pas drôles, des Grandes Têtes Molles de la littérature (Jacques Attali, Alexandre Jardin, Marguerite Duras...), du traitement de l’information (évocation du serial-killer Thierry Paulin), de la mort du cinéma, de la place de la littérature à la télévision, tout y passe. Une férocité sans pitié traverse ces pages qui seront les dernières que Nabe a écrites pour L’Idiot et dont il a accentué encore la cruauté au moment de publier sa version définitive.

Rideau, en 1989, préfigurait l’extinction de l’influence de la télévision bien avant que ce soit Internet qui, justement, marquera la fin de son règne : rideau !

Première page de « Rideau », L’Idiot international n°37

Incipit

I

La société du Spectacle est à l’article de la mort. Elle va crever, maintenant c’est sûr. La délivrance est proche. Le terminus est imminent. Cette vieille salope est entrée dans un coma de bon augure. Il faudrait que quelqu’un ose la débrancher.
Je me dévoue.
Attention ! Il ne s’agit pas de faire ici la satire d’un monde à moquer. Je suis dans un état de béatitude hypnotique. Avant que tout ne s’écroule, je tiens à rappeler ce que nous avons vécu. Procédure d’urgence absolue, la peinture sans rigolade de la Débile Comédie est commencée. Tant pis pour les innocents qui se croient épargnés par les ondes maléfiques des téléviseurs et la logorrhée démagogique des gentillesses ignobles.
Devant la mort de la vie, l’illusion poussée à son comble de pourriture, le tout-fout-le-camp irrattrapable, et le toc intégral érigé en Veau d’or, il faudrait répondre par la démission artistique. Hélas ! ce n’est pas mon caractère.
Dès maintenant, j’irai plus loin : l’article aujourd’hui n’a plus le droit de faire une « œuvre ». Ce sont des gestes qu’on attend de lui désormais, et tant pis si ces gestes ont encore l’air d’être des livres.
Esquiver tous les coups, comme Charlot dans Les Lumières de la ville, mais ne pas refuser de monter sur le ring. Les faux artistes se drapent dans le mépris de ce monde actuel. Ils ont peur de se mesurer à la grande médiocrité médiatique. De rivaliser avec la vieillesse du présent qu’on leur assène. La clandestinité n’est pas une solution. Jamais je n’entrerai dans le maquis des planqués ! De nos jours, descendre dans l’atroce arène de la société sensationnelle est une expérience aussi indispensable que jadis aller en prison. Il faut avoir vécu ça pour pouvoir écrire, je vais jusque-là. On ne mérite se prose qu’après l’avoir mis à l’épreuve des trombes de l’époque.

[...]

Accueil critique

Avis positifs

Dans la Tribune de Genève, Jean-Louis Kuffer parle de « textes à la fois incendiaires et clairvoyants »[2].

Pierre Berruer, dans Ouest-France, juge Rideau « décapant, joyeux, immonde et toujours aussi nombriliste »[3].

Pour Gilles Brochard, dans La Voix de France, Rideau est « à la fois manifeste au vitriol et profession de foi contre l'idiotie »[4].

Dans La Tribune des Alpes-Maritimes, Aurore Bonnel dit de Nabe qu’avec Rideau, « son stylet vengeur, parfois cruel, toujours singulier, entre en guerre contre la société du spectacle. »[5].

André Halimi critique le livre dans Passages en en citant trois passages concernant Léon Zitrone, Serge July et Jacques Séguéla, pour conclure en écrivant que « Marc-Edouard Nabe se défoule, attaque tous azimuts, excessif il l’est mais le livre se lit d’un trait. Fascination par l’invective »[6]

Avis négatifs

Dominique Guillou, dans Le Figaro littéraire, compare Rideau au Régal des vermines, pour s'interroger sur l'intérêt de « concentrer aujourd’hui ses tirs d’artillerie lourde que sur les falotes vedettes de la télévision, du cinéma et de la chansonnette » tout en saluant des formules qui font mouche et « d’étonnantes démonstrations »[7].

Le 24 avril, Le Monde mentionne rapidement le livre et son auteur, qui « vilipende, comme beaucoup de ses prédécesseurs, la “société du spectacle”, dont il prédit la fin prochaine. Emporté sans doute par son élan, il s'en prend indifféremment aux médias, à la critique littéraire, et défend, tout aussi indifféremment, Khomeiny, le fanatisme, Paul-Loup Sulitzer, la “complicité cosmique” de Jacques Vergès et de Klaus Barbie, Jean Genet, “plus juste penseur politique français du siècle”... »[8]

Fin juillet 1992, dans Action française, Laurent Dandrieu résume Rideau à « un vulgaire crachat »[9] En novembre 1992, au début de sa critique de Visage de Turc en pleurs, Michel Audetat signale Rideau dans L’Hebdo suisse en le traitant de « pamphlet un peu mineable, un peu beauf, vite écrit en ronchonnant devant la télévision, et donc médiocrement inspiré. »[10]

Édition

Les droits de Rideau ont été entièrement récupérés en 2008 par Marc-Édouard Nabe, qui peut anti-rééditer l’ouvrage. En attendant, le livre est disponible sur la plateforme de vente de l’auteur, faisant partie du stock de huit tonnes de retour récupéré par voie judiciaire par l’auteur en 2008.

Lien externe

Notes et références

  1. Marc-Édouard Nabe, « Rideau », L'Idiot international n°37, 14 février 1990, pp. 3-6.
  2. Jean-Louis Kuffer, « Marc-Edouard Nabe zigzague entre le pire et le meilleur », La Tribune de Genève, 19 janvier 1993.
  3. Pierre Berruer, « Rideau », Ouest-France, 30 juin 1992.
  4. Gilles Brochard, « Rideau » La Voix de France, juin 1992.
  5. Aurore Bonnel, La Tribune des Alpes-Maritimes, 3 juillet 1992.
  6. André Halimi, « Vacheries littéraires et autres », Passages, juillet 1992.
  7. Dominique Guillou, « Stocks d’esbroufe », Le Figaro littéraire, 13 avril 1993.
  8. « Dernières livraisons », Le Monde, 24 avril 1992, p. 28.
  9. Laurent Dandrieu, Action française, 29 juillet 1992.
  10. Michel Audetat, L’Hebdo suisse, 1er novembre 1992.