Denis Tillinac

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Denis Tillinac

Denis Tillinac est un écrivain, journaliste et éditeur né le 26 mai 1947 à Paris et mort le 26 septembre 2020 au Château du Clos de Vougeot.

Liens avec Marc-Édouard Nabe

Marc-Édouard Nabe et Denis Tillinac se rencontrent en 1986 aux éditions du Dilettante, sous l’égide de Dominique Gaultier, où chacun avait publié des livres, Chacun mes goûts pour Nabe (1986) et Spleen à Daumesnil pour Tillinac (1985). Tillinac, ébloui par la beauté d’Hélène, et pris d’affection pour Nabe, suivra le couple dans leur parcours, publiera des critiques des livres de Nabe (L’Âme de Billie Holiday[1] et Zigzags) et multipliera les allusions nabiennes dans ses propres ouvrages. Par exemple, dans une plaquette de lettres ouvertes à l'otage Jean-Paul Kaufmann : « quelque part entre Céline et Bernanos un certain Nabe fait preuve d’un talent original, mais comme il jette des pavés dans toutes les mares on lui intime le silence » (repris dans Inch’Allah, p. 2097). Ou alors dans La Corrèze et le Zambèze, page 108 : « la belle Hélène Nabe au sourire radieux qui croque l’existence à pleines dents ».

C’est par l’entremise de Tillinac que Nabe rencontrera Jean-Claude Guillebaud, directeur des éditions Arléa, pour que celui-ci publie le récit de son voyage à Istanbul par Marc-Édouard Nabe. Mais Guillebaud se piqua aussi d’éditer le futur Rideau, pamphlet que Nabe destinait à L’Idiot international. C’est durant un week-end qui les amenaient tous dans la maison de campagne en Charentes de Guillebaud, en juin 1989, que Tillinac, sa femme Monique, Nabe et Hélène visiteront tous les quatre, sur la route, la bourgade d’Oradour-sur-Glane détruite avec ses habitants massacrés par les nazis en juin 1944. Le récit de cette visite (détaillée et expliquée dans son Journal, Kamikaze), que Nabe a fait à table au milieu de la garden-party, et avec la complicité des Tillinac, donnera lieu à un scandale campagnard et bourgeois orchestré par Louis Gardel, futur juré du prix Renaudot, et par son fils, qui aboutira à la défection de Guillebaud de publier Rideau (affaire sur laquelle Nabe reviendra dans Les Porcs, page 997). Nabe en profite pour lui retirer son projet de récit sur la Turquie. Tillinac restera toujours préoccupé par les problèmes éditoriaux de Nabe, cherchant à le faire entrer dans différentes maisons, avant qu’il trouve sa place au Rocher.

La même année, 1989, Tillinac profite de ses accointances à la mairie de Paris (Chirac) pour accélérer la demande d’un appartement de la ville de Paris déposée depuis plus d’un an par Hélène. Grâce à ce coup de pouce, le couple peut obtenir en septembre 1989 l’appartement du 103, rue de la Convention (Paris 15e). Tillinac suivra également la naissance de leur fils, Alexandre. Les deux écrivains continueront de se croiser au Dilettante et ailleurs.

En 1992, lors de l’exposition Turqueries rue Keller, organisée par Marie-Isabelle Taddeï, Tillinac sera, avec Claude Nougaro et Édouard Baer, un des acquéreurs d’un tableau de Nabe : une vue d’Istanbul.

En 2004, Tillinac répondra à la chronique soi-disant ironique d’un sombre humoriste, Didier Porte, lors de l’émission Le Fou du Roi de Stéphane Bern, au sujet de Nabe et même d’Hélène[2]. Cela n’empêchera pas l’écrivain, entré à Valeurs Actuelles, de continuer à parler de Nabe, notamment dans ce magazine.

En 2007, Tillinac sera également présent au vernissage de l’exposition de Nabe, Écrivains et jazzmen, à la galerie Vies d’artistes (Paris 6e). Il lui achètera à cette occasion un portrait de Paul Léautaud[3].

En 2007, Tillinac prendra la décision le premier dans le milieu littéraire de faire passer Nabe en poche : en effet, il republiera dans la collection La Petite Vermillon, à la Table Ronde, maison dont il est désormais le directeur, L’Âme de Billie Holiday, initialement parue en 1986 chez Denoël. Pour fêter la sortie du livre, une soirée-vernissage a lieu le 12 juin au club de jazz Le Petit Journal avec un mélange d’amateurs de jazz et figures du monde littéraire et politique, allant entre autres de Laurent Gerra à Alain Soral, en passant par Pierre Étaix, Dieudonné, François Gibault et Eugène Saccomano. Des images de ce raout seront utilisées par Jackie Berroyer dans son documentaire sur Marcel Zannini, intitulé Jazzini.

En 2009, Didier Porte, mal remis d’avoir été mouché par Tillinac, récidive sur la « relation » Nabe/Tillinac dans un article de Siné Hebdo[4]. Comme beaucoup, et pas seulement de gauchistes, Porte ne peut pas admettre que des hommes aussi différents artistiquement et politiquement, et d’une façon flagrante si on daigne se pencher sur les œuvres respectives, puissent s'estimer l’un l’autre à un autre niveau. Nabe, à son tour, saluera le panache et l’audace de Tillinac à son égard dans Chronic’Art en avril 2010 :

Il y a tout de même des éditeurs qui vous ont tendu la main pendant cette période ?
Dans ce milieu, les trois seules personnes qui m'ont tendu la main sont Léo Scheer, Dominique Gaultier du Dilettante et Denis Tillinac de la Table ronde. Je reconnais que ces trois-là ont sauvé l'honneur.

En décembre 2014, pour promouvoir sa nouvelle exposition de ses dessins d’Hara-Kiri de jeunesse, Frédéric Taddeï invitera Marc-Édouard Nabe à Europe 1 dans son émission Europe 1 Social Club où sera également invité Denis Tillinac. Les deux hommes dialogueront en direct au micro, et en toute camaraderie et compréhension. Ce sera l’avant-dernière fois qu’ils se verront, la dernière étant, par hasard, à la Gare de Lyon, en novembre 2019, un peu moins d’un an avant sa mort, et racontée par un témoin dans Nabe’s News[5].

À noter : une messe en hommage à Tillinac, une semaine après sa mort, le 2 octobre 2020, a été célébrée en l’Église Saint-François-Xavier. Un compte rendu par un autre témoin proche de Nabe en a été donné dans le Nabe’s News du 19 octobre 2020[6].

Citations

Tillinac sur Nabe

  • « Dîner très “rive gauche” chez Pascal Sevran et vernissage d’une exposition de Marc-Édouard Nabe le lendemain. Aucune ressemblance entre ces deux personnages et je doute qu’ils s’apprécient beaucoup, encore qu’ils passent l’un et l’autre pour être des écrivains “anars de droite”, appellation contrôlée par personne. En tout cas, ils ont en commun d’avoir été victimes d’une diabolisation indue pour des outrances écrites ou verbales mal interprétées. Sevran n’est pas plus raciste que Nabe n’est antisémite ; sinon je n’aurais pas copiné avec eux. Ils ont pâti, à des degrés divers, d’un sale climat qui vise à réduire la liberté d’expression aux acquêts d'une sorte de pharisaïsme faussement “droit-de-l'hommiste” et porté sur la délation. À l’aune de ce puritanisme, aucune des grands écrivains français du patrimoine ne pourrait publier un livre ou une chronique. Il y a près de trente ans que je gâche de l'encre ; jusqu’à une période récente, ma plume se sentait libre comme l’air. Tel n’est plus le cas. Fut un temps où des écrivains venaient en France pour fuir l’oppression intellectuelle et morale qui sévissait dans leur pays. Où iront se réfugier les écrivains si la moindre dissidence est passible d'une comparution devant les tribunaux de la bien-pensance ? » (« Les tribunaux de la bien-pensance », Valeurs actuelles, 23 février 2007)
  • « Il a fait l’objet d’un ostracisme absolument ridicule, mais ça va passer... Je pense que peut-être l’ère Sarkozy va nous débarrasser de cette manie de diaboliser les gens. » (Regarde les hommes changer, Europe 1, 28 juin 2007)
  • « Le jazz que je préfère, c’est celui du Sud. C’est celui qui nous ramène aux sources du gospel. Dans tous les domaines, que ce soir dans le sport, dans la musique ou dans la littérature je préfère les débuts, quand c’est encore jeune et brut. Comme le dit si bien mon ami Marc-Édouard Nabe, les rythmes ternaires du blues et du jazz sont comme les battements du cœur humain. Nabe m’a beaucoup apporté. Il m’a d'abord fait découvrir Thelonious Monk, puis il m’a offert une nouvelle idole, il y a dix ans, en me faisant écouter Billie Holiday » (Jazzman, octobre 2007).

Nabe sur Tillinac

  • « Samedi 16 juillet 1988. — [...] Une fois tout le monde parti, Tillinac a l’idée saugrenue de faire une espèce de joute stylistique avec moi !... Ça me rappelle Nourago ! “On va aller chercher deux bouquins de nous et on va comparer les styles !” Oh ! l’imprudent ! Il faudrait que quelqu’un l’en dissuade avant qu’il ne soit trop tard. J’ai toujours des histoires comme ça moi. Je me garde de dire quoi que ce soit... Le Régal est dans sa maison d’hiver, ça nous donne l’occasion de visiter une partie du fleuve qui a noyé un village jadis dans la vallée. À la bouteille, avec des palmes, les habitants pouvaient aller finir de jardiner dans leur villa engloutie... La maison d’hiver de Tillinac est aussi sympa que celle d’été, dans une bibliothèque en bordel, il déniche mon premier livre et se choisit comme “arme” son dernier à lui ! “Je fais une littérature simple, de retour aux structures traditionnelles de la France des valeurs saines, dans mon territoires, pour ma famille. Je ne crois pas aux recherches sur le langage, etc.” me dit Denis... Nous rentrons à la maison d’été. Un peu chargé, il donne un instant les bouquins à Charnay qui s’empresse d’ouvrir le Régal au hasard et lit à haute voix, de sa voix claironnante de moustachu rieur :
J’ai horreur des amis. Aucun sentiment ne me donne plus envie de vomir par terre que l’amitié...
On n’a plus entendu parler du “jeu de la comparaison” ! Hop, à la trappe ! Tillinac préfère rejoindre son confortable discours philosophico-social devant une bonne et rassurante omelette aux cèpes. J’aime bien Tillinac : il est beau perdant avant même d’avoir joué ! Il doit se demander quel Martien je suis : ma révolte métaphysique, il la prend pour de la contestation gauchiste ; mon art, il le prend pour du flaubertisme d’“artiste” un peu vain ; ma haine pour la gauche, il la prend pour un amour déçu de la droite !!! Je n’ai pas envie de m’expliquer. Charnay m’y pousse mais faire rire volontiers notre hôte avec quelques “mots” tordus me suffit. » (Kamikaze, 2000, pp. 2785-2786)
  • « Mardi 7 février 1989. — J’invite Tillinac a me suivre à la Huchette où je dois jouer avec mon père. Ça lui plaît bien et il s’assoit près du Mister Guitare dont il ne connaissait jusque-là que le Docteur Stylo !... Au bout de trois morceaux, le visage de Tillinac se brouille en une expression de Mongol soucieux des Steppes, barbu fermé et grimaçant... Est-ce l’atmosphère déprimante de la cave (je le comprendrais) ? Non, je crois bien que c’est l’effet de la musique, uen espèce d’admiration accablée devant le swing incompréhensible qui l’assaille... On est loin des elvisseries de son King des Kons qu’il adore... À la pause, Denis demandera au Zanine si je suis un aussi bon musicien que j’en ai l’air !... Décidément, j’aime bien ce “mec de droit” mal dégrossi, au moins il est vivant, ce qui est très rare dans ce milieu qui me sort des yeux un peu plus chaque jour. » (Kamikaze, 2000, p. 3090)
  • « Samedi 24 juin 1989. — Tillinac, en short et mal rasé, ressemble à un personnage de Morris dans un Lucky Luke, évoluant dans la grand-rue de la “ville fantôme”… On s’attend à tout instant à ce qu’une tribu d’Indiens allemands aux figures peintes de croix gammées nous saute dessus. Dans les ruines des fermes et des granges, je vois des morceaux de véhicules, des portails brisés, vestiges des flammes. Des casseroles toutes cabossées (il y en a une qui ressemble à celle qu’on m’a accrochée à la patte depuis Apostrophes…) et aussi une machine à coudre (je cherche le parapluie mais Lautréamont a dû passer avant moi…). Il y a même, sur une place, une traction intactement rouillée, très belle, ocre, enfoncée délicatement dans le sol : on dirait un moulage pompéien revu par Dalí. Plus loin, un landau de gosse — pour le pathos — est bien mis en évidence : il semble sculpté dans la poussière. […] Tillinac veut partir vite de là. On remonte la rue, voici le champ où tous les villageois ont été rassemblés, puis le mémorial du cimetière avec la crypte exposant dans des vitrines les objets usuels retrouvés après le brasier : montres-oignons arrêtées à l’heure du drame ; peignes ; boîtes ; miroirs ; jouets d’enfants… La chaleur est atroce et cette cave de fraîcheur sinistre est la bienvenue. Nous retranspirons dehors en arpentant les allées du cimetière. Tillinac se lance dans une exégèse sémiologique exaltée des pierres tombales où il décèle la trace de communistes insistant à même la dalle sur la “barbarie” nazie, la “bestialité” des “monstres hitlériens”, les “envahisseurs honnis” et autres “hordes de barbares”, les “Boches” (sic ! c’est la première fois que je vois le mot “boche” gravé dans du marbre…) responsables de l’extermination des êtres chers. D’autres tombes plus discrètes indiquent que cinq enfants ont été “tués” (et non “odieusement massacrés”) par des Allemands, mais la plaque qui ne fait pas grimacer Tillinac, c’est celle où les morts du 10 juin sont fondus dans la liste des autres défunts de la famille, seule la date indique qu’ils faisaient partie du lot : “pudeur et grande classe”, dit-il. Nous rejoignons la voiture, tout remués. » (Kamikaze, 2000, pp. 3305-3306)
  • « Nous serons ensemble avec les Tillinac (isoler les réacs) et la “logeuse” de Pinganaud, une quinquagénaire marrante qui ne cherche qu’à s’encanailler et qui me complimente sur mon pamphlet dont on lui a lu des extraits “à hurler de rire”. Il y a aussi un jeune blond, le fils de Louis Gardel, que Tillinac taquine sur ses clichés bien-pensants. Ezine ne viendra pas. Patier est exilé à une table de sinistres pimbêches et à la fin du repas (repas froid dégueulasse commandé chez un traiteur “nouvelle cuisine”), la grande salle du château ne résonne que de nos rires. Les Guillebaud sont obligés de reconnaître que nous sommes la table la plus drôle et, si le bon esprit raisonnable et socialo des autres invités ne les retenait pas, nous aurions tous les 82 pékins autour de Tillinac et moi racontant notre effrayante visite d’Oradour... Catherine Guillebaud, elle, ne tiendra plus et viendra s’égosiller presque hystériquement à notre table, renversant sa chaise, pissant quasiment dans sa culotte qu’on a déjà entrevue lors d’une audacieuse position... Tillinac propose qu’on écrive à deux un “lieu-dit” Oradour-sur-Glane. Ça vaut toutes les villes exotiques ! Après la Guyane, La Nouvelle-Orléans, le Mexique... Guillebaud lui-même vient plaisanter avec nous. De bon cœur. » (Kamikaze, 2000, pp. 3309-3310)
  • « Denis Tillinak et Alice Déhon passent devant nous. La Table ronde au grand complet. Denis se marre en touchant mon caban framboise :
— Qu’est-ce que c’est que cette veste de pédé de gauche ? » (L’Homme qui arrêta d’écrire, 2010, p. 264)
  • « À la Table Ronde, où je passai prendre des exemplaires de mon Billie Holiday, j’allai saluer le patron Denis Tillinac. Il me félicita pour le livre. On parla aussi de Chirac, ce jour-là. Sa bourde d’habiter dans l’appart’ parisien de son défunt pote Hariri... Puis on dévia sur Sarkozy, le parvenu ! Pour Denis, c’était des rêves de gosse, tout ça : le Fouquet’s, le yacht de Bolloré...
— Il se croit dans la France comme dans un jacuzzi, ajoutai-je.
Tillinac bondit de rire. Il se tenait les côtes, grimaçant comme un paysan de Mongolie. Ça me confirmait mon idée de tract : Jaccuzi !, à la Zola, avec tout ce que je pouvais déjà reprocher au gouvernement Sarkozy, après un mois seulement de règne. Jaccuzi !... Besson allait adorer. » (Les Porcs tome 1, 2017, p. 465)

Intégration littéraire

Notes et références

  1. « Marc-Édouard Nabe — 27 ans — s’est d’ores et déjà imposé comme l’un des écrivains français les moins contournables, avec deux livres intempestifs qui lui ont valu de solides inimitiés. Une manière de complot du silence a même été fomenté lors de la parution de Zigzags : pas de presse, pas de radios, pas de télés pour ce moderne Léon Bloy, mâtiné de Céline qui brocarde volontiers les “intellos” français, leur nombrilisme, leur assoiffement et leur manque d’exigence. Ce contempteur de tout dénonce leurs impostures du haut de sa vision de l’art qui ne tolère aucune concession. C’est peu dire que Nabe aime l’art d’un amour fervent et jaloux jusqu’à la névrose : il vit à l’intérieur de l’émotion artistique, il écrit ou peint ou guitarise perpétuellement, pour étayer la gamme de ses fantasmes. Bref, il croit à la rédemption de l’humain par l’art, et au fond il est le seul, ou presque. Philippe Sollers a eu le bon goût, l’astuce et le courage de mettre son influence au service de ce prosateur superbe et incommode, afin qu’il échappe à l’auto-censure de l’air du temps. C’est pourquoi L’Âme de Billie Holiday vient de paraître dans la collection L’Infini de Denoël.
    Le jazz trône au cœur de l’imaginaire de Nabe, qui est entre autres musicien et fils du jazzman Zanini. Qu’est-ce que le jazz ? Le mode d’expression privilégié de l’âme nègre. Or, Nabe invoque la négritude pour mieux débiner ses frères occidentaux, leur pâleur esthétique et morale. C’est un parti pris : il en faut pour créer. Autour de la figure pathétique de Lady Day, il égrène dans un désordre assez savant des éblouissements, des souvenirs, des hantises, et cela donne un livre plein de poésie, où l’existence prénatale de Nabe à New York rebondit sur le génie de Lester Young en passant par les dérives amoureuses de l’auteur du côté de Montparnasse, son éloge de la came, son approche du racisme et de la religion, son goût pour Élie Faure, Suarès, etc. La trame est chronologique : c’est du destin de Billie Holiday qu’il s’agit — sa voix murmurante implorante tantôt brisée, tantôt gouailleuse — mais au-delà Nabe définit définit et érige en absolu l’émotion esthétique, il la considère comme l’exutoire ultime, la dernière chance d’un univers complètement foutu : le sien, le nôtre.
    On peut contester cette divinisation de la sensation ainsi que ce masochiste antiblanc ; on ne saurait occulter ce provocateur finalement joyeux qui bouscule les rengaines des pasteurs ou des cow-boys pour s’envoler vers les étoiles. Laissons le dernier mot à Philippe Sollers : “Il faudra compter avec ce monstre précis, décidé, tout jeune, niez-le si ça vous arrange, ça ne changera rien.” Gagner quelques années sur M. Manet : triste politique ! “Dixit Mallarmé” » (repris dans Inch’Allah, 1996, pp. 1772-1773)
  2. Extrait de la chronique de Didier Porte, 22 décembre 2004
  3. Léautaud et son chat (1986)
  4. « Sans citer personne, cette fois, Denis Tillinac fustige dans Marianne la “violence des chansonniers à la mode qui, dans les médias lourds (France Inter, par exemple ?) entretiennent un scepticisme ricanant”. Et ce grand ami et admirateur de Marc-Édouard Nabe (réputé pour son sens de la mesure légendaire) de condamner avec force “la violence de l'obscénité qui, sous couvert de transparence, ridiculise des élites complètement déboussolées”... Battons notre coulpe, mes chers confrères en scepticisme obscène aggravé de populisme ricanant. C’est vrai que par nos écarts de langage répétés, nous menaçons cruellement la démocratie. Par notre violence verbale, nous blessons cruellement la sensibilité à fleur de peau de nos élites. » (« Soyons polis avec nos bourreaux ! », Siné Hebdo, 15 avril 2009)
  5. « Les rencontres inopinées d’Anthoine Carton 3) un mort », Nabe’s News n°26, 19 octobre 2020, lire : http://www.nabesnews.com/les-rencontres-inopinees-danthoine-carton-3-un-mort/
  6. « Les rencontres inopinées d’Anthoine Carton 3) un mort », Nabe’s News n°26, 19 octobre 2020, lire : http://www.nabesnews.com/les-rencontres-inopinees-danthoine-carton-3-un-mort/