Franz Kafka

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Franz Kafka

Franz Kafka est un écrivain né le 3 juillet 1883 à Prague (Empire austro-hongrois) et mort le 3 juin 1924 à Kierling (Empire austro-hongrois).

Liens avec Marc-Édouard Nabe

C’est dans son journal intime que Marc-Édouard Nabe commence à parler de Kafka :

« Mercredi 8 février [1984]. — [...] Avant de m’endormir, je prends le risque de me réveiller demain sous la forme d’une véritable vermine : je lis Kafka, le choucas yiddish de la métaphysique. J’avoue que je suis un peu fasciné : cette œuvre plus ruinée qu’inachevée pose un sacré problème. Kafka, on dirait les décombres d’une ville après un bombardement. Laquelle, et par qui ?
Dans cette atmosphère aussi peu kafkaïenne que celle de Sade est sadique, des monuments de ruines ça et là apparaissent : La Métamorphose, Josépha, Le Procès, Le Château, La Lettre au père... Tout cela tient debout comme ça peut. Kafka me touche surtout par ses allégories. Par sa condition même de Juif à mort, il est le grand allégorisateur de la judaïcité. C’est poussé jusqu’au tragique. Il faut bien voir dans Kafka ce qu’il faut y voir : le Juif rhétorique, le martyr de toute Écriture sainte non avouée comme telle. Tout son bestiaire, sa peur, son célibat, son tchécoslovaquisme le prouvent. Kafka échappe à un certain judaïsme pour se faire l’exégète total d’un autre. Il était en conflit avec son judaïsme. Lui-même est clair sur l’accomplissement du messianisme kafkaïen : “L’univers est juif sans moi”... L’œuvre de Kafka m’intéresse en tant qu’aboutissement parfait du Verbe de la Bible. Kafka connaissait les quatre sens du Livre, c’est la raison pour laquelle chaque livre de Kafka constitue une sorte de Kabbale à lui tout seul, une Kafkabbale... Il faut s’y plonger pour mieux savoir de quoi on parle quand on cherche comme moi le Juif céleste.[1] »

En octobre 2018, Marc-Édouard Nabe publie dans la revue Adieu une « Lettre au juge », adressée à Cyrille Vignon, magistrat de Marseille qui l’a condamné après une plainte de l’avocate de Salim Laïbi, maître Naïma Haoulia, pour la lettre ouverte, « Où puis-je vous la mettre, maître ? », publiée en juin 2018 sur Nabe’s News (premier texte censuré de l’écrivain). Dans son texte, Nabe évoque la justice en invoquant Kafka :

« La Justice, c’est du Jarry, mais aussi du Kafka, évidemment... Encore une fois, si je prends exemple sur Kafka, ce n’est pas pour m’illusionner moi-même de vivre quelque chose “à la Kafka”, c’est que je vis d’abord quelque chose de “kafkaïen”, et que j’en trouve ensuite le reflet consolateur chez mon cher Franz. Moi, ça m’arrive en vrai ! C’est la démarche exactement contraire à celle d’un intellectuel qui va puiser dans les livres des autres une marche à suivre pour sa pauvre petite existence. La mienne est déjà littéraire (et vous en faites désormais partie, Cyrille Vignon) : je n’ai plus qu’à en vérifier les troublantes ressemblances, dirais-je, dans les œuvres de fiction de mes frères en injustice.
Claudel sur Kafka: “Dans une société inique, l’innocence constitue à la fois un scandale, un danger et un crime.” Je ne vous rappellerai pas cette scène du Procès où Joseph K. est convoqué par le juge d’instruction dans une salle pleine de monde et de brouhaha, et où le juge demande à K. : “Vous êtes bien peintre en bâtiment ?” “Non, répond K., je suis fondé de pouvoir dans une grande banque.” Et là, toute la salle rit, on ne sait si c’est à cause de la question ou de la réponse. Eh bien, c’est pareil, c’est comme si vous me demandiez : “Vous êtes bien l’injurieux diffamateur raciste sexiste qui insultez une avocate respectable du barreau de Marseille ?”, et que je vous répondais : “Non, je suis un écrivain qui trouve en permanence des idées et des images, qui joue avec les mots et sur le sens de leurs sons, pour me défendre contre les représentants de la société de mon temps qui cherchent depuis plus de trente ans à me faire taire, à écraser mon verbe comme un serpent dans le désert.” Esclaffement général garanti.[2] »

Au début de l’année 2019, Nabe se rend à Prague. Après être descendu dans la maison même d’assurance où travaillait Kafka devenue depuis un hôtel, Marc-Édouard Nabe se rend sur la tombe de l’auteur de Métamorphose, et sur celle-ci casse un œuf dur[3].

La même année, en mars, il reviendra encore sur Kafka dans Aux Rats des pâquerettes en le mettant en parallèle avec d’autres écrivains « révolutionnaires », Charles Ferdinand Ramuz et Louis-Ferdinand Céline.

Kafka sera une des figures clefs de sa galerie de portraits. C’est même un des personnages les plus achetés par ses amateurs (François Gibault, etc.)

Citations

Nabe sur Kafka

  • « En effet, son écriture est sans style. C’est connu. Pas de métaphore de forme pour une immense allégorie de fond. C’est le prix. Chez Kafka, il y a aphorisation des narrations et dramatisation des aphorismes. Je dépouille quelques volumes de nouvelles. Dès qu’il sort des bêtes, des parents et des Juifs, Kafka n’a plus rien à dire. Kafka est “angoissant” et “absurde” parce que son sémitisme est absurde et angoissant. Ses livres doivent être lus dans les traductions de G.A. Goldschmidt, de Claude David et de Marthe Robert : Vialatte était trop impartial... Kafka est l’arme des Juifs, arme de dissuasion. C’est leur bombe K. Einstein ne comprenait pas Kafka. Freud non plus. Par exemple, Chacals et Arabes est le texte le plus antisioniste du monde. Toute l'ambiguïté de Kafka est là. Pour Kafka on ne peut pas être sioniste quand on est écrivain. La terre promise de Kafka, c’était la littérature. » (Nabe’s Dream, 1991, p. 256)
  • « Céline, Ramuz imaginent ce qu’il y aurait de mieux pour l’Homme, et même Kafka ! Oui ! Le docteur Franz Kafka himself, juriste à l’Office des assurances sociales contre les accidents du travail à Prague métamorphosé depuis en hôtel, et dans le hall duquel j’écris ce rajout... Un jour, Kafka a dit à Max Brod en voyant tant de pauvres types blessés par les usines du Capital faire la queue à son Bureau pour être indemnisés : “Au lieu de prendre la maison d’assaut et de tout mettre à sac, ils viennent nous solliciter...” Pourtant dans le quatrième cahier in-octavo, retrouvé après sa mort, on tombe sur une note écrite en 1910, et intitulée La Communauté des travailleurs non possédants... Une série de propositions ! Pas piquées des cancrelats métamorphosés en ouvriers modèles... Et pas “kafkaïennes” pour un sou !
Obligation. — Ne posséder ou n’accepter ni argent ni objet précieux. Seule la possession des objets suivants est autorisée : le vêtement le plus simple (à fixer dans le détail), les instruments nécessaires au travail, des livres, des denrées pour la consommation personnelle. Tout le reste appartient aux pauvres.
N’assurer sa subsistance que par le travail. Ne reculer devant aucun travail pour lequel les forces sont suffisantes et qui ne comporte pas de risque pour la santé. Soit choisir soi-même son travail, soit, si ce n’est pas possible, se soumettre aux décisions du Conseil des travailleurs, lequel est responsable devant le gouvernement.
Ne pas travailler pour un salaire plus élevé que celui qui correspond à la subsistance de deux jours (à fixer dans le détail selon les régions).
Non, non, non, mon cher Franz ! Tout ça, c’est encore de la soumission coupable au “travailleur”, au salarié, qui n’a pas à être sauvé ainsi, pour le principe. Ni par le SMIC, ni par le RSA, Ni par le RUE, ni par un quelconque RIC, aussi post-kafkaïo-ramuzo-célinien soient-ils !... » (Aux Rats des pâquerettes, 2019, pp. 53-54)

Intégration littéraire

Portraits

Portraits de Franz Kafka sur le site de Marc-Édouard Nabe

Notes et références

  1. Marc-Édouard Nabe, Nabe’s Dream, Éditions du Rocher, 1991, pp. 255-256.
  2. Marc-Édouard Nabe, « Lettre au juge », Adieu n°2, 2018, p. 158, lire : http://revueadieu.fr/wp-content/uploads/2018/12/nabe.pdf
  3. « Nabe à Prague », Nabe’s News n°20, 25 mars 2019, lire : http://www.nabesnews.com/nabe-a-prague/