Renaud Camus

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Renaud Camus

Renaud Camus est un écrivain né le 10 août 1946 à Chamalières.

Liens avec Marc-Édouard Nabe

Après avoir parlé avec admiration du journal de Marc-Édouard Nabe dans son propre journal (La guerre de Transylvanie. 1991, 1996), Camus est invité à s’en expliquer sur France Culture par Alain Veinstein, en décembre 1996. Deux ans plus tard, sur la même radio, Camus et Nabe sont invités par Jean-Maurice de Montremy : Camus réaffirme son admiration pour Nabe, qui lui répond ne l’avoir jamais lu :

Renaud Camus : Je suis un grand admirateur du journal de Nabe.
Jean-Maurice de Montremy : Nabe admire lui-même beaucoup son journal, c’est vrai, Marc-Édouard Nabe ?
Marc-Édouard Nabe : Non.
J.-M. d. M. : Vous n’aimez pas votre journal ?
M.-É. N. : Non, c’est pas ce que je préfère dans ce que j’écris. Renaud Camus a une grande supériorité sur moi c’est qu’il m’a lu, moi je ne lis pas mes contemporains, je suis le seul contemporain que je lis et croyez-moi, c’est pas très amusant. Vraiment parce qu’il faut relire, et tout ça, c’est assez pénible et je suis obligé en permanence d’arroser cette prose carnivore qui me bouffe, surtout celle du journal dont la pratique n’est pas je vous dis un plaisir pour moi, je préfère écrire d’autres choses. Sans avoir lu Renaud Camus, j’ai su que, en effet, dans son journal, et je trouve ça une espèce de mise en abîme comme on dit sur France-Culture intéressante, il parle du mien ! Sans m’avoir connu personnellement il a découvert une autre entreprise journalière que la sienne ! Et maintenant c’est moi évidemment qui raconterai cette journée que vous lirez dans quinze ans, où je parlerai de notre rencontre d’aujourd’hui et du journal de Renaud Camus dans lequel il parlait du mien, etc.[1]

Avant cette émission, les deux hommes ne s’étaient rencontrés qu’une fois dans un café du XVe à l’initiative du journaliste Rémi Soulié. Et après cette émission, ils ne se recroiseront qu’une fois, en mai 2000, lors de l’enregistrement de la fameuse émission Ripostes de Serge Moati, où voyant Michel Polac s’avancer vers lui avec de gros dossiers sous le bras, Renaud Camus a pris la poudre d’escampette et ne sera pas présent sur le plateau (voir Les Porcs[2]), laissant Nabe seul s’affronter à Polac.

Citations

Camus sur Nabe

  • « Lundi 8 juillet [1991], 11 : 01. Si, il y a : “... et sous la porte de l’appartement duquel je glisse un mot sardonique.” Décidément, Nabe a un problème avec les relatives complexes. N’empêche : j’ai passé le virus à Flatters, en lui lisant des extraits du livre, il a couru l’acheter, et il ne lâche plus depuis trois jours... Presque rien de ce qui paraît ne nous a tant excités depuis longtemps. Les pages sur le jazz sont si belles et si fortes, indépendamment de ce dont elles parlent, qu’elle me donneraient presque envie de faire de nouvelles tentatives d’écoutes dans cette direction, quoique toutes aient toujours été malheureuses. Je me convaincs en lisant Nabe qu’il y a certainement beaucoup d’exagération et d’injustice dans mon hostilité butée à l’égard de cette musique-là. Lui-même, bien sûr, quant à l’exagération et l’injustice, en remontrerait au diable. D’où vient alors qu’il soit presque seul, parmi les écrivains d’aujourd’hui, à sonner si juste, même quand il se trompe ? Mais il ne se trompe pas pour l’essentiel, quand il s’agit de faire le départ entre ce qui existe et ce qui n’existe pas. » (La Guerre de Transylvanie. Journal 1991, 1996, p. 266)
  • « Mardi 6 août [1991], 19 : 21. Nabisme généralisé, chez Flatters et chez moi. » (La Guerre de Transylvanie. Journal 1991, 1996, p. 298)


  • Alain Veinstein : Il vous arrive d’être très indulgent.
Renaud Camus : Ah oui ? Avec qui ? Alors c’est vous qui allez être méchant, parce que vous allez dire que je suis trop indulgent avec celui-ci ou celui-là.
A. V. : Très indulgent avec des gens qui franchement ne le méritent pas. Je pense à monsieur Nabe par exemple, qui a l’air tout de même de vous fasciner pas mal, puisqu’il est cité à plusieurs reprises dans ce journal.
R. C. : Je trouve Nabe très intéressant. Je le trouve odieux, mais il se donne comme tel. Mais c’est essentiel.
A. V. : Est-ce qu’on peut amuser la galerie avec...
R. C. : D’abord, je trouve que c’est un très bon écrivain. Il a une description d’une exposition Picasso dans une galerie parisienne qui est absolument un morceau éblouissant ! C’est un des écrivains les plus vivants qui soit. Je ne l’ai jamais rencontré de ma vie, il déteste les homosexuels sans doute encore plus que les Juifs, donc c’est vraiment pas par sympathie.
A. V. : C’est peu dire.
R. C. : Je pense que ce n’est pas par masochisme non plus. Je trouve que d’être odieux c’est un assez bon point d’appui à la fraîcheur de la phrase, et c’est un type qui a une phrase. En plus, il y a un effet de vérité. Vous parliez de mes portraits, mais lui, il fait des portraits de Sollers ou du monde littéraire parisien qui sont d’une vérité absolument extraordinaire ! On ne va pas rouvrir ce problème éternel qu’on peut poser et qu’on pose à n’en plus finir à propos de Céline ou d’autres, un écrivain peut-il être odieux, un grand ou un bon écrivain ? Moi je trouve que Nabe est un écrivain que j’ai plaisir et curiosité à lire. Et bien entendu aussi exaspération et aussi hostilité et aussi parfois dégoût, mais tout ça est prévu par lui.
A. V. : Vous mettez toujours quelques adjectifs pour minimiser votre fascination, mais tout de même, la fascination est là.
R. C. : Je ne sais pas si fascination est bien le mot. C’est un des écrivains contemporains que je lis avec le plus d’intérêt. En plus, il théorise ce côté odieux que vous relevez, et que tout le monde relève, comme étant la condition de la liberté. Il n’a rien à perdre ! Il est honorable en cela qu’il a brûlé tous ses vaisseaux. Il n’y a aucune complaisance dans Nabe. On peut lui reprocher bien des choses, il ne prend aucune précaution. Quand on voit tous ces petits écrivaillons dont chaque phrase est dosée pour ne pas déplaire à celui-ci ou celui-là, Nabe a brûlé tous ses vaisseaux. Ça, je trouve que c’est quelque chose d’honorable. Il a tout le monde à dos, à partir de là, on peut peut-être commencer à écrire. On disait tout à l’heure « vous pouvez commencer à écrire quand on avait épuisé le sens », lui il peut commencer à écrire parce qu’il a absolument tout le monde à dos. Du coup, ça fait un effet qu’on peut dire littéraire ou artistique qui est très fort.
A. V. : Heureusement, ce n’est pas lui votre maître à penser ou votre alter ego, c’est, parce que je l’ai lu dans le journal, page 140, c’est Guy Bedos. » (Du jour au lendemain, France Culture, 18 décembre 1996)


  • « Jeudi 30 mai [2002], huit heures et demie du matin. — [...] Il semble qu’Edwy Plenel ait voulu constamment “élever le débat”, disait-il, c’est-à-dire le détacher de ma petite personne, dont il paraît évident qu’il sait peu de choses. Ainsi il revient éternellement sur le fait que je serais “un grand admirateur de Nabe”, et que c’est le genre de signe qui ne trompe, car qui se ressemble s’assemble, etc. Et l’insistance sur ce thème est la preuve absolue, à mon avis, qu’il ne m’a pas lu, ou qu’il m’a très peu lu, car nul parmi mes “vrais” lecteurs ne pourrait s’être mis dans la tête que je suis un “grand admirateur de Nabe”, qui doit être mentionné cinq ou six fois en tout dans des milliers de pages, parmi une foule d’autres noms, et une ou deux fois de façon favorable, en particulier pour une page magnifique à propos de Soutine. » (Outrepas. Journal 2002, 2005 p. 246)

Nabe sur Camus

  • « Renaud Camus, qui venait de se faire crucifier par tout le milieu parce qu’il avait écrit dans son journal intime qu’il y avait trop de Juifs à France Culture. Encore un qui voulait faire son Nabe ! Une sorte de mauvais larron à mon extrême droite... L’œuvre de Camus m’indifférait. Pour moi, c’était un franchouillard déjà, très rococo, avec des goûts de chiottes. Et dans ces chiottes, il y avait un balai à mon effigie qu’il n’hésitait pas à se foutre dans le cul. Car ce pédé assumé racontait des scènes de hammam pendant lesquelles il pensait à mes livres... Renaud était torturé par mes audaces. D’ailleurs, ça lui avait déjà été reproché en 1996 par Alain Veinstein (mari de Laure Adler) dans son émission susurrante et nocturneuse sur France Culture, mais Camus avait été assez classe pour ne pas me renier et – c’est ça qui était drôle – il s’était insurgé auprès de Veinstein qu’on puisse me faire des procès en sorcellerie au sujet des Juifs ! « Antisémite », c’était comme miss France à l’époque, reine d’un jour ! Il fallait en élire un (ou une dans le cas de Renaud) par année. Moi, ça faisait plusieurs années que j’avais passé mon tour et je devenais un peu décrépit comme miss, alors les bien-pensards avaient choisi le pauvre Camus qui subit des foudres épouvantables pendant plusieurs mois... » (Les Porcs tome 1, 2017, pp. 26-27)
  • « Arrivé au studio, Renaud Camus prit peur. La tantouze détala, poursuivie par l’équipe technique de Moati. Il avait encore son micro-cravate et son maquillage alors qu’il courait autour de la maison de Radio France pour échapper à ses intervieweurs. Un sans-couilles, ce pédé ! Je me retrouvai donc seul face à Polac, qui n’avait plus que moi à se mettre sous la dent. Je devins alors une sorte de bouc émissaire antisémite de substitution à Renaud Camus ! » (Les Porcs tome 1, 2017, p. 28)

Intégration littéraire

Notes et références

  1. Panorama, France Culture, 14 janvier 1999, repris dans Coups d’épée dans l’eau, Éditions du Rocher, 1999, pp. 513-514.
  2. Marc-Édouard Nabe, Chapitre III « Ripostes », Les Porcs, anti-édité, 2017, pp. 26-29.