Bernard Pivot

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Bernard Pivot, 2017

Bernard Pivot est un journaliste et animateur d’émissions littéraires né le 5 mai 1935 à Lyon.

Liens avec Marc-Édouard Nabe

Avant son passage dans l’émission Apostrophes, Nabe regarde les prestations des autres écrivains dans l’émission de Bernard Pivot, dont il rend compte dans son journal intime. Le 15 février 1985, Pivot l’invite à Apostrophes pour défendre son Régal des vermines, le thème était « Les mauvais sentiments »... La violence de ton du jeune écrivain, les réactions des autres invités, le faux télégramme de Jean-Pierre Stirbois lu en direct par Pivot et l’agression physique hors plateau de Nabe par le journaliste Georges-Marc Benamou, ont fait scandale et marqué l’histoire de l’émission, celle de la littérature à la télévision et même celle des émissions littéraires sur Internet (mise en ligne il y a une quinzaine d’années, elle n’arrête pas d’être visionnée tous les jours).

Trois ans plus tard, en janvier 1988, Pivot réinvite Nabe à l’occasion de la publication de son premier roman, Le Bonheur, puis en 1999, dans Bouillon de culture pour son diptyque, Oui et Non. En 2001, c’est un dialogue entre Nabe et Pivot qui clôt le premier livre d’écrivain sur les attentats du 11-Septembre, Une lueur d’espoir.

Mais c’est dans son journal intime que Nabe parlera le plus de Bernard Pivot, de sa psychologie et même de sa stratégie d’animateur d’Apostrophes, notamment dans des discussions avec Philippe Sollers et Jean-Edern Hallier.

Citations

Pivot sur Nabe

  • « Marc-Édouard Nabe, vous êtes à vos heures musicien de jazz, dessinateur, et auteur d’un premier livre qui n’est pas un roman, et dont le titre donne bien le ton : Au régal des vermines. À un moment, dans les premières pages, vous dites : “Qui va prendre le risque de publier mes recueils de frissons, qui va boire mes bassines de diarrhée ?” Eh bien, la réponse, c’est l’éditeur Bernard Barrault. » (Apostrophes, Antenne 2, 15 février 1985, retranscrit dans Coups d’épée dans l’eau, Éditions du Rocher, 1999, p. 13)

Nabe sur Pivot

  • « Très lutin Sollers aujourd’hui : je lui dis ce que j’ai pensé de son dernier Apostrophes, il me confirme qu’il avait peur des réactions de Jean-Édern et qu’à chaque émission, il va de consternation en consternation devant “la vulgarité malveillante” de Pivot. Il fait toujours ça à ceux qu’il admire. Je connais. “Il nous aime en plus, Marc-Édouard, soyez-en sûr, il nous aime !” Sollers est persuadé qu’il touche des dessous-de-table pour s’attarder si longtemps sur tout ce qu’il y a dessus : vins, mets, franchouilleries boustifaillesques... » (Kamikaze, 2000, p. 2642)
  • « Pas besoin de bombe, Pivot c’est Hiroshima ! Entre chaque épisode laborieux de sa fête sinistre, il demande à une rangée de bons petits toutous de choisir chacun un mot de la langue française. Alors, grotesquement, d’une écriture bien scolaire, un larbin recopie les “tendresse”, “liberté”, “amour”, “pivot” (Dutourd) et autres banalités sur le décor. Le prof bourguignon passe de rang en rang et arrache de chaque cancre de l’Art son mot. Pour ceux qui n’ont pas l’honneur de descendre au centre du cirque se faire bouffer tout crus par le lion de Lyon, ce sera leur seule contribution à la 724e d’Apostrophes : un mot comme un coup de feu que Pivot les force à se tirer en pleine tête en direct ! Splendide roulette russe ! D’ailleurs, le mot de Pivot (le sien), celui qu’il emploiera sans arrêt pour désigner ce petit exercice, c’est “salve”. “Encore une salve !” “C’est l’heure de la salve de mots”... En effet, quelle hécatombe ! C’est ça ! Pivot ce soir a tiré un mot dans la nuque de chaque traître de la littérature. Il devrait même le faire payer à l’éditeur. Comme en Chine !... Ou en Pologne (c’est-à-dire nulle part)... Ce soir, c’était le Katyn de la littérature ! Pan ! Pan ! Pan ! Tués tous sur place par le ridicule de cette périlleuse interro (qui aurait pu s’en sortir ? Celui qui aurait choisi “Enculé” peut-être...) où les bons élèves ne peuvent cacher qu’ils ont réfléchi depuis un mois au mot le plus “drôle”, ou le plus “profond”, qui les définit parfaitement. » (Kamikaze, 2000, pp. 3767-3768)
  • « Place Saint-Sulpice, au petit matin. Le ciel va être bleu. Je suis assis sur le rebord de la fontaine, face à l’église... Un homme tout gris, l’air endormi, passe devant moi... Blouson flou, pantalon tordu, mal rasé...
Bernard Pivot ! Comme il a changé depuis qu’il n’apparaît plus à la télé... Après trente ans d’émissions littéraires ! Il est en civil... L’image l’a quitté... On sent qu’il est revenu à l’écrit.
— Bonjour... lui dis-je en lui tendant la main.
— Ah ? C’est vous... me répond-il en la serrant. Qu’est-ce que vous faites dans mon quartier ?
— Je lis l’Apocalypse de saint Jean...
— Rassurez-moi : vous n’êtes pour rien dans tous ces événements ?
— Non, pourquoi ?
— Pour rien. Quand j’ai vu les avions percuter les deux tours, je ne sais pas pourquoi, j’ai pensé à vous.
— Ben Naben ?
— C’est horrible, non ?
— J’écrirais bien quelque chose. Qu’est-ce que vous en pensez ?
— Vous n’avez pas l’habitude de demander la permission !
— Ça vous ferait plaisir ?
— Vous savez, moi, maintenant...
— Il y a de tout dans ces attentats !
— C’est la fin du monde...
— Non, Bernard, le début !
— Vous êtes musulman ?
— Mais non ! Je ne suis pas plus islamiste que vous, mais en tant qu’homme qui vit dans et pour la transcendance, je comprends que des hommes de foi aillent au bout de leur dégoût.
— C’est vrai que vous êtes un “élu”...
— Ce monde prospère et sûr exigeait une leçon. C’est d’une infinie justice, si j’ose dire..
— Votre “ami” l’abbé Pierre a dit quelque chose là-dessus : “Il y a des victimes d’un jour et des victimes de tous les jours. Je suis contre l’amélioration du plaisir de vivre des plus forts.”
— Je me demande si ce n’est pas la Terreur qui sauvera le monde...
— Vous allez encore vous faire mal voir, Marc-Edmond !
— Tant pis ! Il y a une petite lumière à sortir de ces décombres... Je veux la montrer...
— Bon. Ce n’est pas que je m’ennuie avec vous, mais je dois aller au kiosque acheter mes journaux... Il paraît que ça y est : les Américains attaquent l’Afghanistan. C’est la guerre !
— Juste une lueur... Une lueur d’espoir... » (Une lueur d’espoir, 2001, pp. 151-153)

Intégration littéraire

Notes et références