K.-O. et autres contes

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K.-O. et autres contes

K.-O. et autres contes est un recueil de contes écrits par Marc-Édouard Nabe entre 1984 et 1998, publié par les éditions du Rocher en janvier 1999.

Résumé

Le livre compte vingt-sept contes. La plupart sont inédits et écrits dans l’objectif de les assembler à ceux qui ont été déjà publiés, notamment dans L’Infini (« Madame Narcisse »...), L’Idiot international (« Nativité mortelle »...), L’Imbécile de Paris (« Le coeur sur la paille »...), Le Serpent à Plumes (« La Clémence enchantée »...) ou même dans Max (« Reconversion »...). Chaque conte est illustré par un dessin au lavis réalisé par Vuillemin, le dessinateur est aussi l’auteur de la couverture (en couleur) illustrant le conte inaugural « K.-O. ». La présence du dessinateur hara-kirien ne fait que renforcer l’impression qui se dégage de la lecture de ces contes peut-être « bêtes et méchants » en tout cas hilarants. L’idée de Nabe, c’était également de recréer pour chaque conte un univers appartenant à un folklore particulier. Par exemple, les Indes pour « Un éléphant mémorable », l’Afrique pour « Baoumba Oui-Oui », ou le Far West pour « Duel nul ». Toutes ces histoires peuvent s’apparenter à celles de Villiers de L’Isle-Adam ou d’Ambrose Bierce, ou d’autres conteurs dont les noms apparaissent en clins d’oeil au détour d’un décor ou d’un personnage.

Les formes aussi sont variées puisque le narrateur peut aussi bien être le rédacteur d’un journal intime ou un chercheur ayant découvert un article scientifique qu’il produit en guise de conte. Il est facile de remarquer que le monde animalier est l’inspiration principale de ce recueil marqué par la férocité et le combat entre l’homme et la bête (voir « L’alligator est inhumain », « Le Dernier Abordage du Glabok » ou « Boucherie féérique »). Relativement intemporels, les contes de Nabe se passent dans un espace et un temps où le symbole qu’ils mettent à jour, au fur et à mesure du déroulement de l’histoire, leur donne paradoxalement toute leur noirceur. Les thèmes religieux ne manquent pas non plus (« Un ange trépasse », La cérémonie du Floutchouk »). Mais c’est l’aspect sexuel de la plupart des contes de K.-O. qui sera difficilement supportable à certains : le dépucelage d’un homme par fécalité féminine, la vengeance d’un prince chinois sur son favori par sodomie digitale ou la découverte au milieu de la jungle d’un clitoris géant... Enfin, c’est l’humour (« Tristesse sur un avant-bras »), plus encore que la mort (« Balle de neige »), qui prime dans chacun de ces vingt-sept récits à la logique aussi implacable que cruelle.


À noter :
K.-O. et autres contes a bénéficié d’un tirage de luxe à 27 exemplaires sur grand papier.
À ce jour, aucune exposition ne s’est tenue pour montrer les dessins originaux de Vuillemin exécutés sur un grand format. Pour être complet, il est à signaler que Vuillemin a choisi un critère original : au lieu d’illustrer le conte dans son thème global, il a prélevé dans le texte une phrase qui n’explicite pas tout le conte et c’est elle qu’il a illustrée. Sans se soucier de spoiler le dénouement, Vuillemin, presque au hasard, a choisi un bout du texte de Nabe comme une sorte de légende à son dessin qui se lit ainsi à plusieurs niveaux, à la fois de compréhension du texte et du dessin lui-même.

Quatrième de couverture

Abracadabrants, tarabiscotés, de mauvais goût, répugnants, infantiles, scatologiques, pornographiques, horribles, tordus, obsessionnels, pas drôles, morbides, sordides, sanglants, absurdes, atroces, pervers, pénibles... Le lecteur aura bien du mal à qualifier ces contes. Pourquoi ? Parce que ce ne sont pas des contes, mais des allégories. Marc-Édouard Nabe raconte l’inracontable. Le conteur ici donne à voir l’impossible, et cet impossible veut dire quelque chose !
Un alligator dévore des appareils génitaux masculins, un huissier vient saisir des organes, un grand pianiste se retrouve avec un seul doigt, un ange change de sexe, des grenouilles partouzent, un éléphant perd la mémoire de son chasseur, un boxeur voit la Sainte Vierge lui apparaître lors d’un K.-O...
Extases rares où rien n’est comme dans la vie, pas même la mort.

Préface

Un prince, pour éprouver la sensibilité de ses prétendantes, place dans leur lit un petit pois sous un vingtaine de matelas. Seule une mendiante, hébergée un soir d’orage par charité, se plaint au petit matin d’avoir eu mal au dos toute la nuit blanche.
C’est une vraie princesse : le prince l’épousera.
Il n’est pas possible que je n’appartienne pas à ce conte d’une façon ou d’une autre. Je sais que j’y suis, mais où ? L’allégorie est simple : je suis le pois que Dieu sent à travers les hommes. Ou bien je suis la princesse qui devine la mort à travers les bonheurs entassés. Je suis le prince qui n’épouse que la Mort, seule vraie princesse sensible de ce monde, ou bien Dieu — petit pois suprême — qui n’empêche de dormir que les morts...
Quelque part, mais où ?

Incipit

K.O.

Le buffle américain se présenta en souriant. Il avait l’air mélancolique des invaincus. Noir comme du cirage, luisant et lent de gestes, il accueillit le premier coup de gong sans impatience. De la rumeur, se dégagea le « Suicidaire » : un pied-noir massif, 93,5 kg, trente ans, Marcel Noblart, qui ne demandait qu’à faire connaissance. Trois jabs, un swing, cinq petits directs « en piston » : un vrai tête-à-tête.
Bien vite, le salon de thé tourna au boudoir fébrile. Le pied-noir parvint à toucher du bout des lèvres le Noir monstrueux. Un uppercut le remercia. Il se releva tout de suite, bien que son moral ne fût plus des décombres au soleil... L’Américain laissa danser le pied-noir autour de lui comme un Peau-Rouge autour de son totem. Les gens ne hurlaient plus dans la salle. Un con murmura près d’une mouche : « Laissez venir à moi les petits enfants ! » et la première reprise s’acheva en queue de poisson.
On ôta les deux dentiers des deux côtés. Marcel Noblart semblait sortir d’une douche. Le Nègre eut presque soudain envie d’abandonner pour créer un « événement ». Perdre, c’est la jouissance secrète des champions. Finalement, il décida d’en finir.
Le ring n’était plus qu’une chaloupe. C’était foutu. Le pied-noir était sur le point de le comprendre lorsque le Noir, à l’allonge infinie, lui assena dès les premières secondes du second round, un formidable gros plan de gant rouge. Marcel Noblart renifla son sang. L’Américain était dans sa catégorie comme un poisson dans l’or. Marcel ne s’y trouvait que par raccroc. Il avait toujours voulu boxer au-dessus de ses moyens. Déjà jadis à Tunis...
Mais le démolisseur s’en cognait : il fit le jardinier, planteur de gauches. C’était le printemps, ce type : floraison de gnons rares, bourgeons du massacre... Bien sûr quelques crochets furent bloqués par le pied-noir, mais même quand il les esquiva, son orgueil était si bas qu’il eût aimé qu’ils aboutissent pour le ranimer. Les cinq dernières secondes, Marcel Noblart, par l’entrelacs tortueux de son jeu de jambes, surprit le taureau d’une douceur à l’œil. Au moment où le monstre s’apprêtait à lui visser le nez au fond du palais, le réveil sonna.

[...]

Table des matières

K.O., p. 9
Madame Narcisse, p. 17
La Cérémonie du Floutchouk, p. 25
Un mauvais tour, p. 39
Le Dernier Abordage du Glabok, p. 49
Histoire de jouir, p. 61
La Philosophie d’Hamilcar Guimir, p. 69
La Cœur sur la paille, p. 79
La Clémence enchantée, p. 93
L’Alligator est inhumain, p. 101
Reconversion, p. 111
Nativité mortelle, p. 121
Baoumba Oui-Oui, p. 129
Rixe tragique, p. 161
Un ange trépasse, p. 173
Premier amour, p. 187
Duel nul, p. 197
Le Roi et l’Oiseau, p. 207
Le Bal des Baobabs, p. 215
Boucherie féérique, p. 233
Esclandre au bord du gour, p. 248
Subtil supplice, p. 251
Le Saut de la mort, p. 265
Un éléphant mémorable, p. 273
Tristesse sur un avant-bras, p. 289
Balle de neige, p. 303
Sainte Nabe, p. 315

Lectures

Depuis avril 2020, Bastien Montes enregistre et publie sur YouTube des lectures intégrales de certains contes qu’il agrémente de bruitages et d’extraits de musique.

Le dernier abordage du Glabok


Histoire de jouir


La clémence enchantée


Le Roi et l’Oiseau


Nativité mortelle


Balle de neige


K.-O.


Un éléphant mémorable

Accueil critique

Dans Voici, Frédéric Beigbeder juge que le recueil, « réussi », « appartient à la tradition du conte délirant »[1].

Sébastien Lapaque, dans Le Figaro, remarque l'« inspiration étonnante » et conseille la lecture du recueil à « ceux qui croient Nabe peu doué pour la fiction »[2].

Éclats

Dans sa galerie de la rue Sauton, il est arrivé à Nabe de recevoir des lecteurs de K.-O. et autres contes. Par exemple, Serge à qui l’auteur a demandé de raconter son propre conte à la grande hilarité perplexe des personnes présentes.

En novembre 2015, c’est au tour du conte « Un éléphant mémorable » d’être raconté par Serge (toujours lui !) qui en analyse le contenu allégorique (notamment sur le thème de la mémoire) alors que Nabe replace ses contes dans l’ensemble de son œuvre.

Édition

K.-O. et autres contes s’est vendu à 2 500 exemplaires[3]. Les droits de K.-O. et autres contes ont été entièrement récupérés en 2008 par Marc-Édouard Nabe, qui peut anti-rééditer l’ouvrage. En attendant, le livre est disponible sur la plateforme de vente de l’auteur, faisant partie du stock de huit tonnes de retour récupéré par voie judiciaire par l’auteur en 2008.

  • Marc-Édouard Nabe, K.-O. et autres contes, éditions du Rocher, 1999, 327 p. ISBN : 2268030334

Lien externe

Notes et références

  1. Frédéric Beigbeder, « Des nouvelles nouvelles », Voici, 16 mars 1999, p. 58.
  2. Sébastien Lapaque, « Un astre libre », Le Figaro, 7 janvier 1999
  3. Alexandre Fillon, « Nabe le maudit ? », Livres Hebdo, 25 février 2000.