Chet Baker

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Chet Baker

Chesney Henry Baker, Jr., dit Chet Baker, est un jazzman né le 23 décembre 1929 à Yale (États-Unis) et mort le 13 mai 1988 à Amsterdam (Pays-Bas).

Liens avec Marc-Édouard Nabe

Le 9 septembre 1983, Marc-Édouard Nabe, au Twenty-One, boîte de jazz parisienne, présente Chet Baker. « Chet Baker vient me remercier très chaleureusement avec son sourire de Joconde junkie et ses yeux à fond d’orbite, capricorniennement complice et sympathisant.[1] » À la fin de son engagement, Chet veut jouer un morceau en hommage à Nabe et lui demande de le choisir (tout cela est raconté dans son journal intime). En mai 1988, dans son journal intime encore, Nabe évoque la mort de Chet Baker :

« Samedi 14 mai 1988. — Chet Baker est mort. À Amsterdam, d’overdose certainement. On l’a retrouvé écrasé sur le trottoir du Prins Hendrik. Il devait encore davantage ressembler à Pasolini et Artaud...
Autodéfenestré par son mauvais ange, Chet est mort, c’est tout ce qu’on peut dire pour l’instant. En chat écorché, il avait plutôt l’habitude de grimper à l’aube aux façades des hôtels quand il avait oublié les clefs de sa chambre plutôt que de se jeter par la fenêtre... Le grand jazzman blanc, à ce niveau, devient l’exception parmi les exceptions. Vilain petit canard (blanc !) au milieu de la couvée de cygnes noirs : quel son ! En voilà une trompette de l’Apocalypse. Parmi les sept qu’en a compté saint Jean à Patmos, il y avait à coup sûr celle de Chet Baker. Encore un que j’aurai connu... J’ai frôlé ses ailes ! Chez Paudras, las et là, tout en absence je le revois sur la chaise. On aurait dit qu’il continuait à jouer même quand il ne jouait pas, il était dans son son, perpétuellement en train de souffler mentalement une de ses ballades plus que lentes, tellement lentes qu’on s’y perdait. Qui a joué plus lent que Chet Baker ? C’était sa façon d’être aussi grand jazzman que les noirs supersoniques. Il n’était pas cataleptique pour rien ! Et en dehors du mythe romantico-destroy du défoncé sublime, qui permet aux journalistes de se faire une idée de ce qu’ils devraient ressentir, il y avait un musicien. Aujourd’hui, on a l’air d’oublier que Chet Baker était un musicien de jazz et que c’est pour ça qu’il est mort.[2] »

En 2012, Marc-Édouard Nabe réalise une série de 30 portraits de Chet Baker, en alternant les techniques (aquarelle, craie, encre, marker).

En 2016, Nabe est filmé dans un Éclat en compagnie d’Aziz, Valentin, Anthoine et Leslie en train de chanter par-dessus le solo de Chet Baker sur Just Friends

« Leslie qui ne mène nulle part », Éclat filmé en septembre 2016.

Citations

Nabe sur Baker

  • « Le grand malheur de Goya, c’est qu’il n’a pas pu faire le portrait de Chet Baker. Soutine non plus, ni Jérôme Bosch. Tant pis pour eux !... Il y a des hommes dont on lit le visage comme un parchemin : celui de Chet Baker est un inestimable papyrus, et il se dévide par sa trompette comme un télex. La mythologie est d’une actualité brûlante. Chet Baker porte sa musique sur la figure. » (texte de présentation de Chet Baker, lu en sa présence, le 9 septembre 1983, au Twenty-One, repris dans Nabe’s Dream, publié en 1991).
  • « Il y a plus de 25 ans maintenant que ce long capricorne froissé déploie ses blessures, et tout le monde croit qu’il s’agit de simples notes. C’est le propre de beaucoup de musiciens de Jazz de souffler dans les plaies mêmes dont l’existence les a parés. La particularité de Chet Baker est d’exprimer davantage que ses seules misères : il se charge de tous les outrages possibles. Le Christ n’a porté qu’une croix de bois. Chet Baker se crucifie tous les jours lui-même à sa trompette. Cette trompette, qui est si lourde à porter, ne l’est pas par le seul poids de chaque note, mais par sa signification. La musique est une phrase vide : les plus forts sont ceux qui la remplissent de sens, qui enfoncent aux bons moments des solutions de lumière. Chet Baker est le roi de cloutage-là. » (« Le Portrait de Chet Baker », Zigzags, 1986)
  • « Certains, écoutant Chet Baker chanter, croiront faire une distinction entre sa voix prénatale et le son qui sombre dans le paradis de sa trompette. Il s’agit du même lyrisme. Entre le moment où il embouche sa voix et celui où il miaule dans son instrument, un seul frisson : c’est du caviar de soupir… » (« Le Portrait de Chet Baker », Zigzags, 1986) 

Intégration littéraire

Portraits

Portraits de Chet Baker sur le site de Marc-Édouard Nabe

Notes et références

  1. Marc-Édouard Nabe, Nabe’s Dream, Éditions du Rocher, 1991, pp. 94-97.
  2. Marc-Édouard Nabe, Kamikaze, Éditions du Rocher, 2000, pp. 2632-2633.