Sacha Guitry

Sauter à la navigation Sauter à la recherche
Sacha Guitry

Alexandre Guitry, dit Sacha Guitry, est un dramaturge, écrivain et cinéaste né le 21 février 1885 à Saint-Pétersbourg (Empire russe) et mort le 24 juillet 1957 à Paris.

Liens avec Marc-Édouard Nabe

Grand amateur de son écriture et de son écriture cinématographique, Marc-Édouard Nabe a beaucoup vu de films et réfléchi sur les œuvres de Sacha Guitry, rencontrant dans les années 1980 des témoins du cinéaste-dramaturge. Il en parle avec abondance et enthousiasme dans son journal intime. Sacha sera l’une des figures récurrentes de son travail de portraitiste.

Citations

Nabe sur Guitry

  • « Dans le train, je lis Quatre ans d’occupations de Sacha Guitry encore. Quelle merveille de finesse ! L’esprit royal du Sacha blessé. C’est là où il est le meilleur. La douleur se meut avec aisance. Et quelle prise de conscience de la page : il joue si puissamment avec sa rhétorique — entre l’oral et l’écrit. Il se ballade très intelligemment entre les fac-similés. Les formalistes du langage peuvent aller se rhabiller. Cette autoplaidoirie drôle et majestueuse n’est pas loin du “journal intime”. La façon dont il travaille le passé, même s’il est récent, est probante : Sacha n’est pas seulement un cinéaste-dramaturge-acteur, c’est un écrivain, un grand. Quatre ans d’occupations (je n’ai pas encore lu Soixante jours de prison, tout écrit à la main) est un livre splendide. » (Nabe’s Dream, 1991, p. 142)
  • « Samedi 8 février 1986. — Pour aérer les atmosphères laborieuses et psychologiques, j’ai la bonne idée d’organiser une soirée théâtrale : nous allons en famille (mon mauvais cœur me perdra) voir Le Veilleur de nuit de Sacha Guitry au Théâtre 13 (encore) avec Fabrice Luchini. J’avais apporté Zigzags pour le lui offrir mais je me reprends après avoir lu que, de son propre aveu, l’excellent Luchini n’est pas littéraire du tout : je me contente de l’aborder à la fin du spectacle. Luchini, très las et encore sur les nerfs de son rôle, s’excusant de ne pas nous tenir la jambe, se montre tout de même très courtois : il dit qu’il me connaît et affirme qu’il écoute même Marcel “souvent”. Nous échangeons quelques propos céliniens et tout en reluquant Hélène, il me certifie que le père Monnier a une grande admiration pour moi. Nous sommes appelés à revoir cet intéressant individu. J’aime les acteurs, surtout quand ils sont dans cette veine ensanglantée de l’excès d’avant-guerre. Luchini ne cache pas ses accointances. Dans Le Veilleur de nuit, pièce formidable de Sacha écrite à vingt-six ans en 1911 et toujours pas ridée, il interprète magnifiquement le rôle du jeune peintre amoral possédé par la magnanimité écoeurante du protecteur de sa grue. Magistral. La vieux Dudicourt, qui reprend le rôle d’Harry Baur, est remarquable, moustachu, pathétique, lourdaud, et très subtil. Les autres sont un peu en dessous d’eux deux, mais la situation et les dialogues sont si parfaits que même le passable devient sublime quand les violonistes ont devant le menton une partition pareille. L’histoire nous faisait irrésistiblement penser à notre propre période Salem. Je rirai toujours à ce qu’Hélène m’a glissé à l’oreille au moment où Dudicourt, survenant en surprise à “l’avenue Hoche” alors que “l’artiste” fuit par la porte de sortie, se jette sur sa poule pour la sauter : “La ressemblance s’arrête là !” Je suis aussi ravi que pour sa première pièce depuis longtemps (la dernière qu’elle a vu, c’est justement Mon père avait raison de Guitry encore, avec Paul Meurisse, trois jours avant son infarctus !), Hélène soit si bien tombée. Elle qui déteste le théâtre sort de là emballée, emballée par la pièce et les acteurs, mais également par l’intimité de la salle, par la magie du contact dramatique, par le souffle de la grâce, l’archaïsme de la promiscuité, les délicatesses de cet art funambulesque. » (Tohu-Bohu, 1993, pp. 1462-1463)
  • « Voici le film le moins solennel de Sacha, celui qu’il a dessiné le plus schématiquement possible, par lassitude sans doute de l’être humain et de son éternelle médiocrité. L’homme est minable, qu’il soit assassin, flic, clown, metteur en scène, gangster ou putain : seul un fantaiste qui tourne à l’aigre pouvait le démontrer. Il n’y a pas plus de différence entre un innocent et un coupable qu’entre deux jumeaux ou même qu’entre deux jumeaux et leur sosie. De la part d’un Kafka ou d’un Pirandello, le constat n’est pas si grave (on s’y attend) ; de celle d’un “amuseur” parisien star soi-disant boulevardeuse, adulé dandy royal, c’est plus dur à accepter. Les Trois font la paire sont encore une variation de ce réquisitoire anti-humaniste de l’ultime Guitry. L’histoire des doubles, agrémentée de purs numéros de cabaret (Rigaux, Cowl) quasiment scotchés sur le scénario, est là pour valoriser, l’instant d’une invraisemblance, la stupidité des vaniteux (tous les protagonistes le sont). Sacha arrose la bêtise des êtres humains pour le seul plaisir de voir pousser leur cynisme. On rit, mais ce n’est pas drôle. Il faut se garder de l’homme pense Guitry. “Méfie-toi z’en !” comme dit un des gangsters du film. » (Inch’Allah, 1996, pp. 1965-1966)

Intégration littéraire

Portraits

Portraits de Sacha Guitry sur le site de Marc-Édouard Nabe

Notes et références