Lucette Destouches

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Lucette Destouches

Lucie Almansor, dite Lucette Destouches, est une danseuse française née le 20 juillet 1912 et morte le 8 novembre 2019 à Meudon. Elle est la femme de l’écrivain Louis-Ferdinand Céline.

Liens avec Marc-Édouard Nabe

Marc-Édouard Nabe rencontre Lucette pour la première fois le 16 novembre 1987[1]. Dans les années 1990, il la fréquente plus assidûment jusqu’à écrire, en 1994, un roman la mettant en scène avec son entourage (Jean-François Stévenin, François Gibault, Mouloudji, Toto, Roxane, etc.), publié en février 1995 chez Gallimard : Lucette.

À l’occasion de son centenaire, en 2012, Antoine Gallimard demande à Nabe, qui en avait récupéré les droits, la permission de rééditer son livre en collection Folio (le premier de l’écrivain). Nabe remettra le premier exemplaire de ce nouveau Lucette (avec une couverture dessinée par lui), le jour même de son anniversaire, soit le 20 juillet 2012, à la consternation générale des céliniens présents (sauf une...).

Photo inédite, Meudon, 20 juillet 2012

Écarté de ses obsèques, le 14 novembre 2019, par l’avocat François Gibault, Nabe écrira une lettre ouverte à ce dernier pour exprimer son mécontentement : il y annonce aussi d’autres souvenirs à venir sur sa relation à Lucette Almansor[2]. Dans le Nabe’s News n°25 (11 mai 2020), Nabe reviendra sur son enterrement à travers le témoignage d’Anthoine Carton ayant croisé François Gibault juste après les obsèques (publié dans le Nabe’s News du 15 décembre 2019)[3], puis la polémique née entre le père Vivarès, qui a célébré la cérémonie, et François Gibault, parce que le prêtre a posté sur son Facebook une photo de la tombe ouverte de l’écrivain et de la danseuse au cimetière de Meudon, prise par lui[4].

Citations

Lucette sur Nabe

  • « Moi, je n’existe pas, et je n’aime pas qu’on me demande de parler de Céline. Je ne comprends toujours pas comment Marc-Édouard a réussi à écrire ce livre. Tout est vrai comme dans un roman. C’est entre la vie et le rêve. Ça me rappelle son portrait de Billie Holiday où on ne voyait pas la femme, on voyait l’âme. Si tous les écrivains sont dangereux, Nabe ne l’est pas plus qu’un autre. Il danse sur les sentiments. C’est ça, son style. Tout a été dit. Maintenant, la parole est à l’écriture. » (préface à Lucette, 1994)

Nabe sur Lucette

  • « Ayant, avec raison, totalement confiance en moi, Lucette accepta que j’écrive sur elle et son mari, en dépit des grimaces de son entourage. Elle est venue me le dire en personne, chez mon éditeur Jean-Paul, dans la petite cuisine qui me servait de bureau : je m’étais trouvé un coin à côté des poubelles et au milieu des secrétaires papotantes qui venaient y faire leur café. Lucette est entrée et m’a dit en souriant : “OUI !”... C’était comme un mariage. Pas encore elle et moi, mais entre la fiction et le réel (“Monsieur le Réel, acceptez-vous de prendre pour épouse Mademoiselle la Fiction ?”). » (Alain Zannini, 2002, pp. 345-346)
  • « Filip, surtout, son Filip ! Le Two n° 1... Il était venu avec Lucette et François chez moi. Il a fait des pirouettes et des contorsions. Puis de la gym avec Alexandre, ils se sont déshabillés dans le salon. Mon fils torse nu (on voyait bien la cicatrice de son opération), aux pieds de la veuve de Céline qui caressait ma chatte Pin-Up : Hélène et moi, on admirait le tableau.... “Et puis ils seront si fiers d’être dans ton livre !” ajouta François... Parfait ! Encore mieux ! J’ai rétabli les sacrés prénoms et le livre est parti chez l’Autre éditeur...
J’ai eu tout le mal du monde à le faire admettre dans La Maison, qui me l’avait cependant commandé. Antoine, le boss, a été parfait (les boss sont souvent les meilleurs, c’est parfois pour cela qu’ils sont les boss) : je me suis très bien entendu avec lui, mais quel tollé à tous les étages ! Bordel noir à la Banque centrale. Je n’ai pas vu beaucoup Philippe à ce moment-là, pourtant l’une des fées du Logis. Je tenais à lui démontrer que je pouvais basculer tout seul dans la Blanche. Il n’était pas pour notre projet lui non plus :
— Quel intérêt de ramasser les miettes d’un grand écrivain ? dit-il au petit Yann venu aux renseignements. Et puis ça ne se fait pas de piquer la femme de son dieu, même s’il est mort depuis trente-trois ans !
Philippe m’a téléphoné mystérieusement le lendemain matin du jour où j’ai remis le manuscrit à Antoine : c’est la première fois que j’entendais bafouiller mon écrivain mentor... Encore sous le choc de la lecture négative qu’il en avait déjà faite, ou bien inquiet pour moi des ennuis qui m’attendaient ?... Qui saura ? Mon roman sur Lucette fut mon seul livre dont Philippe ne me parla jamais.
Six mois de lutte acharnée. Des pressions terribles de toute la maison d’Achille, comme Céline appelait le grand-père d’Antoine, pour déplacer mon livre, le retarder, le cacher tout en le sortant, lui retirer sa valeur de témoignage à cause de mes “délires” puis soudain l’inverse, m’enlever toute crédibilité littéraire en le rangeant dans une collection documentaire... Une jaquette ? Avec une photo inédite du couple ! Oui, mais il y a des chiens... Trop de chiens sur la jaquette ! Finalement, Antoine a opté pour le retrait de la bande rouge au nom indiffusable de “Madame Céline”, au moment de la mise en place en librairie... Exceptionnelle mesure ! Cas unique de destruction d’une bande déjà imprimée... J’étais presque flatté... Antoine a jeté ma bande rouge comme un morceau de viande aux sous-tigres de l’édition et du journalisme. Hop, il m’a arraché mon bandeau, mais comme on débâillonne une bouche qui veut parler.
— Je ne suis pas une couille molle ! me dit le plus grand éditeur français.
Apparemment, ça n’a pas suffi car “notre” roman a bel et bien été torpillé. Le cocktail était explosif : Céline + Lucette + moi chez Antoine, et sans un zeste de Philippe ! Trop c’était trop... Tous les céliniens m’ont tourné le dos et mes lecteurs n’ont pas compris ma petite trouvaille romanesque (qui depuis a fait florès) : mettre en scène des gens réels comme s’ils étaient inventés et, comble du vice, sous leurs vrais noms. Jusqu’au dernier jour, les rumeurs s’autotamponnaient. Le soir même où j’ai eu le livre en main, Jean-François et moi sommes montés à Meudon. Devant la maison, il y avait une voiture, c’était celle du professeur Henri, annoteur des chefs-d’œuvre de Céline dans la Pléiade (en fait, il préférait Giono et Malraux...). Henri était venu “avertir” Lucette :
— Chère madame Destouches, n’espérez rien. Ce livre ne sortira jamais. Je sais de quoi je parle : je suis tout le temps fourré chez Antoine... De source sûre, madame ! Sûre !
Alors, Jean-François et moi, on est entrés. Au pied de Lucette allongée sur son divan, j’ai déposé tranquillement le premier exemplaire du livre de sa vie. Quand il l’a vu, l’universitaire a fait une grimace digne de celle d’un Japonais qui reçoit un coup de sabre dans le ventre. Quel bon tour ! Son non-livre s’était transformé sous ses yeux en objet imprimé ! La réalité dépasse la fiction, mais la fiction écrase le fantasme. Comme je me moquais un peu de lui dedans, Henri voulut me faire un procès ! [Sic !] Dans sa propre maison d’édition, contre un livre à la gloire de son auteur de chevet et de sa veuve chez qui il avait montré patte grise pendant des années afin d’obtenir des manuscrits ! Finalement, comme tous les autres, Henri s’est contenté d’assister au sabordage de mon roman. Tous les proches de Lucette me sont tombés dessus. Que de trombines d’intimes vexés ! J’étais le maudit de Meudon, celui qui avait dit ce qu’il ne fallait pas dire (en gros, que Lucette était vivante). La susceptibilité de sa petite cour a été si violemment endommagée que la reine trop sincère s’est retrouvée lâchée par des amis vieux de quarante ans, honnie comme au bon vieux temps, mais par ma “délicieuse faute” (comme elle disait) cette fois ! Il a même fallu qu’on s’“escape” un week-end tous les deux à Dieppe comme des malfaiteurs : c’est une des dernières fois où Lucette a conduit sa voiture : « Venez, Nabe, la mer veut nous voir ! » (Alain Zannini, 2002, pp. 347-349)

Intégration littéraire

Portraits

Portraits de Lucette sur le site de Marc-Édouard Nabe

Notes et références

  1. Marc-Édouard Nabe, Inch’Allah, Éditions du Rocher, 1996, pp. 2320-2324.
  2. « Mon petit François », Nabe’s News n°23, 15 décembre 2019, lire : http://www.nabesnews.com/mon-petit-francois-lettre-ouverte-a-maitre-gibault-par-marc-edouard-nabe/
  3. Anthoine Carton, « Rencontre : “Je connais Marc-Édouard Nabe.” par Anthoine Carton », Nabe’s News n°23, 15 décembre 2019, lire : https://www.nabesnews.com/rencontre-je-connais-marc-edouard-nabe-par-anthoine-carton/
  4. « Lucette forever ! », Nabe’s News n°25, 11 mai 2020, lire : http://www.nabesnews.com/lucette-forever/