Claude Lanzmann

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Claude Lanzmann, 2011

Claude Lanzmann est un réalisateur né le 27 novembre 1925 à Bois-Colombes et mort le 5 juillet 2018 à Paris.

Liens avec Marc-Édouard Nabe

Dans son édition du 25 mars 2010, Le Point publie une interview de Marc-Édouard Nabe qui revient sur l’« affaire Karski » qui avait opposée l’auteur de Shoah à l’écrivain Yannick Haenel (L’Infini) ayant, selon Lanzmann, déformé la réalité au nom de son droit à la fiction. Nabe donne entièrement à Lanzmann sur ce point :

« Claude Lanzmann est mon ennemi idéologique. Il est sioniste alors que je suis antisioniste, il est antipathique et dogmatique. Il a fait de la Shoah sa chose. Si l’on m’avait dit qu’un jour je le soutiendrais, je ne l’aurais jamais cru ! Et pourtant, concernant l’affaire Karski, Lanzmann a raison. En affirmant que le livre de Yannick Haenel est un “faux roman”, le vieux Lanzmann a révélé la supercherie et mis le doigt sur le vrai problème de fond. À travers la question de la falsification historique se pose celle du rapport à la vérité dans la littérature. Jan Karski lui-même m’intéresse assez peu, mais je pense, comme Claude Lanzmann, que c’est un peu gros, comme le laisse entendre Haenel, de faire passer les Américains pour les complices de l’extermination des juifs. La vérité, c’est qu’ils s’en foutaient ou qu’ils n’y croyaient pas. Il y a suffisamment de raisons de haïr les Américains pour ne pas en rajouter. [...] Lanzmann est ulcéré parce que le Karski qui parle dans le livre de Haenel n’est pas crédible. Un bon écrivain a le droit de se tromper et même de commettre des erreurs historiques. Mais pas un mauvais. Yannick Haenel fait partie de ces goys zélés qui veulent en faire plus que les juifs et les historiens pour se voir attribuer des bons points.[1] »

Dans le premier tome des Porcs (2017), Nabe raconte que Laurent Binet lui a rapporté la réaction de Lanzmann à la lecture de sa défense par Nabe dans Le Point :

« D’ailleurs, quand mon article était paru, Laurent Binet m’avait raconté qu’un prof proche de Lanzmann, Éric Marty (sale crapule anti-Genet), s’était étonné de voir réagir si bien l’auteur de Shoah : “Mais enfin, c’est quand même Nabe !”, ce à quoi Lanzmann avait répondu : “Je m’en fous. Ça aurait été Goebbels qui aurait écrit ça, je serais aussi content !”[2] » 
Dédicace de Lanzmann à Nabe, 30 mars 2010.

La réaction positive de Claude Lanzmann se vérifie au Salon du livre, le 30 mars 2010. D’abord, « Olaf », un proche de Marc-Édouard Nabe, obtient sur un flyer de Chronic’Art une dédicace de Lanzmann : « Pour Marc-Édouard Nabe, en attendant une vraie poignée de mains sioniste et ferme. Claude Lanzmann. » Toujours au Salon du livre, Lanzmann est interrogé par une journaliste de L’Œil de l’exilé :

— Qu’est-ce que vous pensez d’auteurs comme Marc-Édouard Nabe qui s’auto-éditent ? Je ne sais pas si vous en avez entendu parler...
— Il est pas con. Il est pas idiot, c’est pas un imbécile.
— Vous feriez la même chose ?
— Non, car je n’aurais jamais le courage de faire ça.
— Vous pensez qu’il a du courage de faire ça ?
— Oui.
— Pourquoi ?
— J’en sais rien. Parce qu’il est... Ça m’est arrivé de lire un ou deux trucs, et bien qu’il ne m’aime pas, je crois. Je crois pas, je suis sûr... Mais moi, je le trouve marrant.

En juin 2010, Marc-Édouard Nabe rencontre fortuitement Claude Lanzmann dans le quartier Saint-Germain, à Paris. Il raconte l’épisode dans le premier tome des Porcs :

« Le même jour, en fin d’après-midi, comme je me baladais à Saint-Germain, qui vis-je sortir de la Hune ? Claude Lanzmann ! Oui, en personne ! En chemisette de lin. Je fonçai droit sur lui en lui tendant la main :
— Et cette poignée de main ? lui demandai-je brutalement.
Comme j’avais mes lunettes noires, il ne me reconnut pas instantanément : “Nabe...” ajoutai-je. Alors Lanzmann me serra vigoureusement la main. Je n’étais pas déçu de sa “poignée sioniste” qui, jusqu’alors, n’était restée qu’au stade de la promesse autographe. Oui, Lanzmann me serrant la main en plein jour, devant tout le monde, devant la terrasse du Flore ! Quelle photo à faire... À vos drones ! Il me tapa même le bras, affectueusement, en me disant :
— Vous avez beaucoup de talent, j’ai lu vos affiches. Même quand vous m’attaquez, vous en avez beaucoup...
Si ça, ce n’était pas un homme ! Et souriant au soleil, massif, lumineux, pas du tout un teint de four crématoire...
— Vous êtes souvent au Tong Yen, dis-je à Lanzmann, voyons-nous !
— Oui, je suis surtout dans le 14e. Avec plaisir... me répondit-il.
Ce roc juif me donna même son “mobile”, que je notai sur mon carnet. Et on se quitta, chacun pour monter dans le train de son histoire.
Je devais certainement être un des seuls au monde à fraterniser aussi bien avec Carlos qu’avec Lanzmann ! Et pour des raisons bien différentes, mais finalement qui se rejoignaient, qui convergeaient. Vers quoi ? Vers la vérité ![3] »

Dans le premier tome des Porcs, Nabe raconte également avoir rencontré Lanzmann une première fois dans les années 1990, chez Lipp avec Jackie Berroyer. Lanzmann visiblement énervé de se retrouver face à l’écrivain, sans toutefois créer de scandale, par égard pour sa compagne de l’époque, Judith Magre, passa son chemin[4].

Après la rencontre de 2010, Claude Lanzmann et Marc-Édouard Nabe s’échangeront des SMS jusqu’en février 2018 (cinq mois avant la mort du réalisateur de Shoah)[5].

Intégration littéraire

Notes et références

  1. Agathe Fourgnaud, « Marc-Édouard Nabe : “Lanzmann a raison” », Le Point n°1958, 25 mars 2010, pp. 116-117.
  2. Marc-Édouard Nabe, Chapitre CCXCVIII « Lanzmann au salon », Les Porcs tome 1, anti-édité, 2017, p. 927.
  3. Marc-Édouard Nabe, Chapitre CCCVIII « Pour un front anti-conspi », Les Porcs tome 1, anti-édité, 2017, p. 966.
  4. Marc-Édouard Nabe, Les Porcs tome 1, anti-édité, 2017, p. 925
  5. « Lanzmann était mortel », Nabe’s News n°16, 29 août 2018, lire : http://www.nabesnews.com/lanzmann-etait-mortel/